Mais l’auteur s’est imaginé peut-être qu’on lirait plus volontiers en deux volumes des Lettres qu’on n’avait pas voulu lire en deux feuilles.
Plaute, comique Latin, suivit la manière d’Aristophane ; comme Térence imita celle de Ménandre, dont il ne fut pas, comme on se l’imagine, le simple traducteur : de même qu’aujourd’hui, un Auteur Anglais qui de deux Pièces Françaises, en compose une dans le goût de sa Nation, ne peut être, sans injustice, privé du mérite de l’invention. […] Ce qui caractérise encore plus le comique Italien, est ce mélange de mœurs nationales, que la communication & la jalousie mutuelle des petits Etats d’Italie, a fait imaginer à leurs Poètes.
On s’imagine que ce n’est pas blesser la pureté que d’aimer d’un amour que la conscience représente comme sage. […] Et quelles plus grandes peines, je vous le demande, peut-on imaginer, que de nourrir une pareille passion, de brûler sans cesse, de porter partout la fournaise d’un amour insensé et les reproches de sa conscience7 ?
Cette sévérité venait de l’ancienne discipline des pénitents, qu’on étendait, comme on voit, jusqu’au carême, où toute l’église se mettait en pénitence ; et de peur qu’on ne s’imagine que cette discipline des pénitents fût excessive ou déraisonnable, Saint Thomas l’appuie de cette raison : que ces spectacles et ces exercices Ibid.
Se seroit-on imaginé que la France deviendroit si humble ? […] Il entasse une foule de lieux communs en faveur du mariage que personne ne conteste : La Cour de Rome, ajoute-t-il, n’a imaginé la loi du célibat ecclésiastique que pour former dans chaque royaume un corps à part, prêt à servir contre la puissance temporelle, & ne reconnoître que le Pape pour souverain. […] Y a-t-il de l’esprit à imaginer de pareilles absurdités ? […] Qui auroit imaginé que Mansard, le Brun, Perraut, Girardon, Coustou, Patru, Bossuet, Fenelon, Bourdaloue, &c.
» Se l’imaginerait-on que l’on ose tourner le saint Baptême en dérision, à la face d’autant de Chrétiens qu’il y a de témoins de cet attentat ? […] Or, s’imaginerait-on que Mr C. sans que son sujet l’y conduise en aucune sorte, ne regarde ce prodige que comme un feu follet, ou comme le Cerf volant de Sydrophel dans Hudibras ? […] C’est à peu près comme si quelqu’un mettait le feu à une maison, et s’imaginait l’éteindre en criant, Au feu. […] le démon était pour ainsi dire un saint dans ses Oracles par rapport à ce qu’il est dans ses Comédies : ses blasphèmes n’ont fait que croître à mesure que son langage s’est enrichi ; et l’on s’imaginerait aujourd’hui que Légion était une Muse.
Imaginez la Comédie aussi parfaite qu’il vous plaîra : où est celui qui s’y rendant pour la première fois, n’y va pas déja convaincu de ce qu’on y prouve ? […] Oui ; j’imagine que la Comédie doit toujours produire cet effet, & celle qui le rendra plus sensible, doit aussi passer pour la plus utile. […] Mais la dernière disposition de cet Article est cruelle, mon amie : comment l’avez-vous imaginée ? […] Qui lui donna la hardiesse de composer un Drame, chef-d’œuvre de l’esprit humain plus difficile, je ne dis pas à imaginer, mais à exécuter, que le Poème épique ? […] Le grand succès de la Farce de Pathelin, par Guillaume de Lorris, fit imaginer de mêler des Farces avec les Mystères, pour attirer plus de monde.
C'est se tromper grossièrement que de s'imaginer qu'on puisse conserver son cœur pour Dieu au milieu des pompes du monde.
Les qualités des parties & de leurs familles sont ordinairement fausses ou très-douteuses, On écrit ce que dit le pere, le parain, les parens, de leur nom, surnom, noblesse & état : c’est un curé qui écrit ce qu’on veut, un vicaire qui ne connoît point les gens, un secrétaire à qui on fait écrire, & qui met ce qu’on lui dicte ; & les parens ne manquent pas de se donner toutes les décorations qu’ils imaginent. […] On avoit répandu que cette princesse ayant désiré de voir un jugement criminel suivant les formes usitèes dans nos tribunaux, on avoit imaginé d’en faire sur le théatre un tableau d’après nature, qu’on pût voir avec moins de répugnance. […] Quelques écrivains ont imagine que c’étoit un bien de renforcer ainsi le caractere de la nation : c’en seroit donc un aussi de renforcer les vices des particuliers ; mais ce n’en est un qu’aux yeux de ceux pour qui les passions, les vices sont des biens. […] Aucun des systèmes d’éducation dont on est inondé n’a imaginé d’établir Polichinel instituteur de la jeunesse. […] Elle est inutile aux poëtes, il suffit d’avoir du génie, de l’imagination, de la verves de sentir, d’imaginer fortement.
L’esclave le plus vil qu’on puisse imaginer, Sera digne de moi, s’il peut l’assassiner. […] On imagine des conversations entre la mère et le fils qui ne furent jamais, et qui autorisent l’insolence de tous les rebelles. […] Dans une lettre adressée à Racine le fils, et imprimée à la fin de ses remarques sur les ouvrages de son père, on voit un Magistrat, Poète dramatique, condamner et justifier le théâtre, faire le procès à Racine le père, et l’absoudre, trouver la scène dangereuse, presque irréformable, et imaginer de la réformerw. […] le grand Prêtre, qui allume le feu de la révolte et s’efforce de corrompre Catilina, à qui on fait jouer le rôle d’homme de bien, tandis que le Ministre de la religion est un scélérat : personnage postiche, de l’invention de l’Auteur, qui n’influe en rien dans le dénouement, et qui n’a été imaginé que pour avoir occasion de faire ce portrait déshonorant du Clergé : « Et je sais, quand la haine enflamme vos pareils, Jusqu’où va la noirceur de leurs lâches conseils, Surtout dès qu’il s’agit de venger leurs injures. […] Quel homme, qui librement et par choix altère la vérité pour entasser toutes les horreurs qu’il peut s’imaginer !
Ce procès odieux, imaginé sur la scène ; a été commencé très-militairement. […] Cet homme respectable imagine de donner tous les ans à celle des filles de sa Terre qui jouiroit de la plus grande réputation de vertu, 25 liv. somme alors considérable. […] Ce bal champêtre, ces filles, ces rubans en baudrier, ces garçons qui les tiennent par la main, cette Rosiere poudrée, frisée à cheveux flottans en grosses boucles, toute cette décoration théatrale imaginée par Favart, pour contenter ses actrices, fut en effet exécutée sur la scène italienne, lorsqu’on y joua la Rosiere.
Le masque facilite tout ; les aventures qu’il fait naître, qu’il cache, qu’il favorise, le caractère des danses qu’il fait imaginer, l’amusement des préparatifs qui faisoit dire à Fontenelle, au moment qu’on partoit pour le bal, le plaisir est passé, vous l’avez goûté en vous préparant, le mouvement de l’exécution, les équivoques auxquelles l’incognito donne lieu, ont fait le succès de ces folies, & en font l’extrême danger. […] Aucune qui n’assure très-sérieusement & ne s’imagine faire croire que plus chaste & plus heureuse que Lucrece, elle a passé plusieurs années sous la même tente & dans le même lit avec ses camarades, sans que jamais aucun ait pris la liberté d’examiner, ni se soit apperçu de son sexe, ni elle-même ait eu la plus légère distraction qui ait pu la trahir. […] Les Grecs avoient imaginé par malice d’en faire qui ressemblassent parfaitement aux personnes qu’on vouloit jouer.
Tout cela est fort incertain et fort peu important ; qui pourrait épuiser ou imaginer les raffinements du luxe et de la vanité des femmes, surtout des Comédiennes ? […] S’ils sont assez téméraires pour s’y placer, qu’on les en arrache : « Si qua in his locis in quibus solent nostræ imagines conservari, pictura Pantomimum aut vilem offerat Histrionem, illico avellatur. […] la religion, les mœurs, le bon ordre, permettent-ils d’imaginer que dans un royaume chrétien on leur fasse une nécessité d’un métier infâme ?
On y voit de plus, Monsievr, cinq ou six hommes derriere les Satyres & les Nymphes, entre lesquels je m’imagine Menandre & Aristophane, les tablettes & le crayon à la main, & aupres d’eux vn chariot à demy renuersé, d’où sont tombez des habillemens de Theatre, quelques flustes, plusieurs brodequins, & force masques. […] Quelqu’vn leur ayant dit que les Poëtes Comiques enseignoient, & qu’ils estoient appellez Docteurs, ils ont pris à la lettre ce que quelqu’vn leur a dit ; & se sont imaginez que pour passer Maistres, il falloit dogmatiser, & venir estaler sur la scene les plus subtiles connoissances qu’ils auoient acquises à l’Eschole.
Comme il m’est extremement sensible de me voir hors des occasions de vous escrire (car de tous les maux que ie souffre depuis que ie suis en exil, celuy qui m’afflige le plus c’est de ne vous pouvoir entretenir) aussi m’est-il impossible d’exprimer la ioye que ie ressens, quand ie vous puis tesmoigner mes soins, & vous faire auoüer que pour estre separés de corps nous ne le sommes pas d’esprit ; & certes ie m’imagine estre parmy vous autres toutes les fois que ie vous visite de mes lettres. […] Demandez-luy en-suitte le chemin qu’il a tenu pour arriuer au Spectacle, vous le verrés confus, & forcé d’auoüer que les lieux infames, la conuersation des femmes prostituées, la veuë des débauches publiques, & des nudités scãdaleuses, le deshonneur & l’infamie, & tout ce qui se peut imaginer de lascif & de plus honteux dans vne ville ?
Je défie tous les Corneilles, quelque grands qu’on les dise, d’imaginer de si brillans spectacles, ni de composer des ouvrages qui approchent de la beauté des Écritures. […] Qui a donc pû persuader à une poignée d’hommes oisifs & vicieux, embarrassés de leur loisir & de leur personne, blasés, dégoûtés & languissans par leurs excès, & leur donner la confiance de s’imaginer qu’ils persuaderoient au monde, ce que leur propre expérience & celle de tous les siecles dément, qae le théatre est le souverain bonheur, le centre du plaisir, l’unique félicité de la vie ?
Ainsi c’est une étrange illusion, que de s’imaginer que le plaisir de la Comédie puisse être compatible avec les gémissements et les pleurs dans lesquels un pénitent doit passer sa vie. […] Peut-on donc s’imaginer que cet esprit conduise jamais à la Comédie un Chrétien qui est l’enfant de Dieu ?
Les noms des Personnages peuvent aussi être vrais & supposés ; en mettant des noms vrais dans une Pièce, il est permis malgré cela d’en imaginer le Sujet ; & en mettant des noms supposés, on est maître d’y placer des choses vraies & réelles.
Ils se sont imaginés qu’elle n’était qu’un tableau grotesque d’une chose grave & sérieuse ; ils ont cru que tourner en plaisanteries les endroits les plus sérieux des Ouvrages estimés, c’était produire une éxcellente Parodie.
On me dira que les Symphonies des entre-Actes ont été imaginées afin de délasser par intervale les Spectateurs ; mais l’usage des chœurs intimement liés au sujet, était bien plus délicat & plus dans les règles de l’art.
qu’ils s’imaginent que le monde est heureux, lorsque ceux qui l’habitent, ne travaillent qu’à embellir leurs maisons ; et qu’ils ne font pas d’attention à la ruine de leurs âmes, lorsqu’on s’amuse à bâtir des Théâtres magnifiques, et qu’on détruit les fondements de la vertu ; lorsque les riches dans l’abondance des biens où ils se trouvent, mettent leur gloire à entretenir les débauches des Comédiens, pendant que les pauvres gémissent dans la misère, et que les choses les plus nécessaires à la vie leurs manquent.
Ceux que vous y voyez aller assidument ne sont pas toujours aussi respectables que vous pourriez vous l’imaginer.
Je m’imagine que d’autres hommes sont organisés comme moi, et par conséquent reçoivent une même impression.
afin qu’on ne s’imagine pas que je m’amuse ici à subtiliser, venons à la principale autorité, qui nous défend les spectacles : elle est fondée sur notre baptême. […] Les anciens s’imaginaient, que par cette sorte de spectacles ils rendaient leurs devoirs aux morts ; surtout après qu’ils eurent modéré la barbarie de cette pratique par une cruauté moins barbare. […] Témoignage sensible de leur aveuglement : ils aperçoivent mal, ce qu’ils pensent bien apercevoir : ils s’imaginent que c’est une serviette, et c’est l’image du Diable précipité du ciel dans l’enfer. […] Non, mes Frères, la foi nous les rend déjà présents ; et nous pouvons les imaginer, comme s’ils se passaient actuellement à nos yeux.
» Je ne saurais m’imaginer que le Poète ne fût pas réellement dans l’état qu’il dépeint : car il y a bien de l’engourdissement et de la pesanteur d’esprit dans tout ce discours. […] Lorsqu’on a une fois imaginé un caractère, il doit suivant la règle d’Horace subsister uniforme, semblable à lui-même, et au premier plan jusqu’à la fin. […] . »Sa passion change en un tour de main ; il est métamorphosé en admirateur de la vertu, et s’en retourne néanmoins aussi corrompu qu’on peut se l’imaginer. […] La différence des sens ne change pas la nature du crime au point que vous vous l’imaginez peut-être. […] On ne peut rien imaginer de plus pernicieux à la probité et à la Religion, que le système du Théâtre, que nos Poètes se sont fait.
De même un Pécheur qui se rend coupable d’un crime qui attire les censures ecclésiastiques, comme la Simonie, l’Usure, s’il étoit dénoncé, cesseroit d’être enfant de l’Eglise, conservant néanmoins l’habitude de la foi, celle-ci n’étant incompatible qu’avec la seule infidélité, selon le Concile de Trente1 ;l’Avocat a donc grand tort, Mademoiselle, de s’imaginer que l’Excommunication des Comédiens supposeroit en eux la tache d’hérésie, (pag. […] Je suis fâché, Mademoiselle, de vous offrir tant d’objets épineux, à vous qui n’entendez & ne prononcez que des choses agréables : le chemin de la vérité n’est pas sémé de fleurs, il en coûte presque autant à la chercher, qu’à marcher sur ses traces, parce qu’aussi-tôt elle est bien connue, on la suit avec moins de peine que l’on ne se l’imagine.
» Avec ces réflexions de l’Ecriture ; tout devient saint, mais on les passe comme inutiles, pour supposer que Judith s’excite à jeter des regards funestes à la pudeur, et on s’imagine la voir. […] Et doit-on s’imaginer qu’en conduisant le dessein d’une pièce, ils ne mettent jamais dans la bouche des Acteurs, que ce que Dieu même leur ferait dire. […] Ces défendeurs du Théâtre s’imaginent-ils qu’on respectera des Comédiens, quand ils auront contrefait des Saints, et pensent-ils qu’on n’aura plus rien à leur dire, lorsque leurs pièces porteront les noms les plus vénérables ?
Il s’imagine entendre le parterre enchanté demander l’Auteur à grands cris.
Je dirai tout autant de mal de la Comédie ; on s’est imaginé qu’elle reformoit les mœurs, en tournant le vice en ridicule : quelle étrange réforme est celle du Théâtre !
C'est pourquoi dans ce discours, aux choses qui concerneront conjointement la Comédie et la Tragédie, les Comédiens et les Tragédiens, je ne me servirai bien souvent que du premier nom ; ce que je dis afin que l'on ne s'imagine pas que je veuille mettre autant de différence entre les Acteurs de ces deux sortes d'ouvrages, comme il y en avait entre eux et ceux qui s'appliquaient aux autres Jeux de Théâtre ou de scène, qui n'avaient presque rien de commun avec ces premiers.
Nous défendons aux Peuples dans toutes les Villes de notre Empire les divertissements des Théâtres, et du Cirque le Dimanche, qui est le premier jour de la semaine, le jour de la Naissance de notre Sauveur Jésus-Christ, le jour de l'Epiphanie, les jours de Pasques, et de la Pentecôte, tant qu'on porte les habits blancs, qui par leur blancheur, comme par des rayons célestes figurent la nouvelle lumière qu'on reçoit au Baptême; Comme aussi les jours qu'on célèbre, avec grande raison la mémoire du martyre des Apôtres, qui sont les Maîtres de tous les Chrétiens; afin que les fidèles occupent tout leur cœur et tout leur esprit au service de Dieu, et que s'il y a encore des personnes qui suivent l'impiété des Juifs, ou l'erreur et la folie des Païens, ils reconnaissent que le temps des prières est bien différent du temps du divertissement, et des plaisirs, et afin que nul ne s'imagine qu'il est obligé d'assister aux Spectacles, ou de les représenter à notre honneur, par la vénération et le respect qu'il doit à la Majesté Impériale, sans avoir même égard au culte qu'on doit à Dieu, de peur de nous offenser en faisant paraître moins d'affection envers nous, qu'il n'avait accoutumé de faire; Nous voulons que tout le monde soit persuadé que le plus grand honneur que nous puissions recevoir des hommes, est que toute la terre rende à Dieu tout-puissant la soumission, et le service qui est dû à sa grandeur.
Il faut être étrangement prévenu contre ses contemporains, pour s’imaginer qu’ils ne seroient pas capables de connoître & de sentir les beautés des Ouvrages du Sophocle François, s’ils n’étoient appuyés de l’autorité de leurs ancêtres. […] Dès-lors on commence à être injuste ; c’est-à-dire, à ressembler à ces hommes contre lesquels on s’éleve avec trop de violence : on s’imagine être raisonnable, on paroît absurde : ce n’est point par excès de vertu ni de raison ; car la raison & la vertu ne sont pas susceptibles d’excès, c’est erreur de l’esprit, c’est vice d’imagination. […] Si j’ose ici réclamer ses droits, n’allez pas, je vous prie, vous imaginer que ce soit un effet de mon antipatie pour elle. […] Il avoit imaginé le projet de l’établissement d’une Cour de raison, où l’on devoit employer d’abord les remedes les plus doux, les plus efficaces ensuite, jusqu’aux petites maisons inclusivement, pour temperer les ebullitions de l’esprit, & corriger les écarts de l’imagination.
Il a fallu, ce me semble, pour imaginer un pareil genre de divertissement, que les hommes en eussent auparavant essayé et usé de bien des espèces ; quelqu’un qui s’ennuyait cruellement (c’était vraisemblablement un Prince) doit avoir eu la première idée de cet amusement raffiné, qui consiste à représenter sur des planches les infortunes et les travers de nos semblables pour nous consoler ou nous guérir des nôtres, et à nous rendre spectateurs de la vie, d’acteurs que nous y sommes, pour nous en adoucir le poids et les malheurs. […] Je me souviens d’avoir vu autrefois en manuscrit un Opéra d’Atrée, où ce monstre périssait écrasé de la foudre, en criant avec une satisfaction barbare, « Tonnez, Dieux impuissants, frappez, je suis vengé. » Cette situation vraiment théâtrale, secondée par une musique effrayante, eût produit, ce me semble, un des plus heureux dénouements qu’on puisse imaginer au Théâtre lyrique. […] Et pourquoi s’imaginer, comme ont fait presque tous nos Auteurs, qu’une pièce ne puisse nous intéresser sans amour ? […] S’ils craignent pour leurs mœurs les effets et les suites de la Comédie, ce que j’ai déjà dit en sa faveur ne les déterminera point à la recevoir, comme tout ce que vous dites contre elle ne la leur fera pas rejeter, s’ils imaginent qu’elle puisse leur être de quelque avantage.
Mais je m’imagine qu’il en résulterait souvent que le premier serait un misérable, & le second au contraire un homme très-estimable, auquel cas notre Caustique se trompe furieusement. […] » Pour lui prouver que cette école n’est pas si dangéreuse, il faut que je lui cite ce que dit l’Abbé d’Aubignac dans son Traité de la Pratique du Théâtre, t. 1, p. 3 ; « il ne faut pas qu’on s’imagine que les Spectacles ne puissent donner qu’une splendeur vaine & inutile. […] A l’égard du Spectacle55 dont il fut frappé dans sa jeunesse, n’imaginez-vous pas à ce récit qu’il a tâché de colorer du mieux qu’il a pu, n’imaginez-vous pas voir ces Orgies en l’honneur du Dieu de la Treille, & n’est-ce pas citer pour édifier la débauche la plus infâme ? […] Il s’imagine donc qu’on veut le flater, & il se trouve insensiblement guéri par le plaisir même qu’il a pris à se séduire. […] Garde-toi donc de me taxer de négligence, mais j’imagine un moyen qu’il te faut mettre en usage.
il serait ridicule de se l’imaginer, puisque ce terme, en notre Langue, ne désigne, comme je l’ai remarqué plus haut, qu’un chant simple, presque toujours sur le même mode, enfin qu’une espèce de Chansonnette. […] Ira-t-on s’imaginer que mon dessein soit de soutenir qu’il faut mettre de l’esprit dans une Ariette ?
Puis-je ne point parler ici des deux Théâtres qu’imagina Curion, ce voluptueux, qui n’avoit d’autre revenu, dit agréablement Pline, que la discorde des Grands ? […] Ce Curion imagina deux Théâtres, qui opposez l’un à l’autre, pendant qu’on jouoit une Piéce dans l’un & dans l’autre, se rejoignoient ensuite tirés par des Machines, & formoient un Amphitéâtre.
Je n’ai rien à dire non plus contre l’amour de Plisthène et de Théodamie ; c’est plutôt l’effet d’une sympathie naturelle, qu’une véritable passion ; puisqu’il se trouve à la fin qu’ils sont frère et sœur : cependant cet amour a servi infiniment à l’Auteur, que je trouve très louable de l’avoir imaginé, et encore plus d’en avoir sû faire un si bon usage : car, outre qu’il n’offre rien qui blesse la bienséance la plus austère, les deux Amants sont d’ailleurs occupés de motifs trop importants pour s’amuser à filer des Scènes de tendresse ; aussi l’Auteur les a-t-il évitées avec grand soin, et ne s’est servi de l’amour que pour donner plus de force à la compassion de Plisthène, qui sans cela ne devrait s’intéresser que médiocrement à la vie du père de Théodamie, ne sachant pas qu’il fût aussi le sien. […] Si pourtant on se donne la peine de lire avec attention la mort de César, de M. de Voltaire, je suis persuadé qu’on conviendra que, dans toute Pièce aussi bien imaginée et aussi rigoureusement écrite que celle-ci, les rôles des femmes peuvent être supprimés, sans que les Spectateurs les regrettent.
J’ai toujours été étonné que les Comédiens, pour leur propre intérêt, n’aient pas imaginé de se retirer dans un lieu particulier avant le spectacle, pour se raffermir ensemble dans leurs rôles, & prendre l’état qui leur est propre.
L’Esclave le plus vil qu’on puisse imaginer Se rend digne de moi, s’il peut l’assassiner.
Car c’est alors qu’elle se met en defense, qu’elle devient subtile, & ingenieuse, qu’elle s’imagine mille pretextes pour appuyer son droit, & que dans la crainte d’être privée de ce qui la flate, elle vient enfin a bout de se persuader, que ce qu’elle desire est honnête & innocent, quoi qu’au fond il soit criminel, & contre la loi de Dieu. * Mirum quippe quam sapiens sibi videtur ignorantia humana, cum aliquid de hujusmodi gaudiis ac fructibus veretur omittere.
Le premier, qui était né en Cilicie, imagina de représenter, par le seul secours de la Danse, des actions fortes & pathétiques.
Il ne faut pas non plus s'imaginer que les Comédies et les Tragédies aient jamais fait partie essentielle et nécessaire des Jeux Scéniques ; car ils furent institués et joués sans elles durant cent cinquante ans ou environ, depuis le Consulat de Stolon, jusques au temps de Plaute et de Nevius, devant lesquels je ne trouve point que Rome les ait connues, et si tôt qu'elles eurent acquis de l'estime, on les fit passer dans la célébration de tous les Jeux pour en augmenter la magnificence et le plaisir, comme on sait que les Comédies de Térence ont été représentées aux Jeux Megaliensc, Romains et autres.
Qu’on ne s’imagine pas que ces mauvaises maximes ne nuisent pas, parce qu’on n’y va que pour se divertir et non pour y former ses sentiments.
Il ne faut pas s’imaginer que Tertullien condamne ici les devoirs qu’on rend aux défunts suivant la sainte, et constante pratique de l’Eglise ; puisqu’il veut qu’on fasse des prières et des oblations pour eux, ainsi qu’il le déclare ailleurs : de coronat. milit. c.
Un François en est enchanté, le poëte qui en a imaginé le reve est un homme admirable, l’amour quel qu’il soit, sera toujours délicieux. […] On a imaginé une comédie muette, en figures grotesques, qui se suivent par ordre, ce sont des pantins en mouvemens, une espece de pantomime animé qui joue la comédie par ressort, ce sont des marionnettes de grandeur humaine. […] Il faut être aveugle pour s’imaginer, on ne l’est pas assez pour être convaincu, qu’on peut en conscience s’exposer à un si grand danger.
Ce cercle lui donne libéralement le goût, les graces, les talents, le génie, le discernement & toutes les connoissances, Entraîné par le tourbillon de ces suffrages, & par le vent d’une gloire si brillante, il n’imagine pas seulement qu’il puisse faire des fautes, & qu’il puisse exister ailleurs quelque merite. […] La folie de des Yvetaux fut de s’imaginer d’après les romans, que la vie pastorale est la plus heureuse : il s’habilla en berger & la chanteuse en bergere, un chapeau de paille sur la tête, la houlette à la main, la paneliere à son côté, ce nouveau Corridon suivi de son Amarillis, qui jouoit de la harpe, conduisoit dans les allées de son jardin des troupeaux imaginaires, leur faisoit des vers, leur chantoit des chansonnettes, & les gardoit du loup, des oiseaux qu’il avoit dressé venoient y mêles leur ramage. […] C’est , dit le dix-neuvieme volume, une des plus belles fêtes qu’on puisse imaginer, la seule qui ait parfaitement réussi.
Pendant vingt ans, les gens de lettres et les amateurs ont sollicité, sans succès, ce second théâtre, et l’on n’imagine pas aujourd’hui comment il a pu éprouver tant de difficultés. […] Comment imaginer de nouveaux subterfuges ? […] Si MM. les comédiens François ont imaginé, en se donnant eux-mêmes un titre exclusif, empêcher la liberté du théâtre, ils se sont trompés ; elle est nécessaire pour les progrès de l’art dramatique, et pour que les Pieces de la Nation soient dignement représentées.
Tertullien fait une réflexion bien vraie dans le traité qu’il a composé des spectacles ; il dit que l’ignorance de l’esprit de l’homme n’est jamais plus présomptueuse, ni ne prétend jamais mieux philosopher et raisonner, que quand on lui veut interdire l’usage de quelque divertissement et de quelque plaisir dont elle est en possession, et qu’elle se croit légitimement permis : car c’est alors qu’elle se met en défense, qu’elle devient subtile et ingénieuse, qu’elle imagine mille prétextes pour appuyer son droit, et que dans la crainte d’être privée de ce qui la flatte, elle vient enfin à bout de se persuader que ce qu’elle désire est honnête et innocent, quoiqu’au fond il soit criminel et contre la loi de Dieu. […] Ce jeu perpétuel, ce jeu sans interruption et sans relâche, ce jeu de tous les jours et presque de toutes les heures dans le jour, s’accorde-t-il avec ces grandes idées que nous avons du Christianisme, et que Jesus-Christ lui-même a pris soin de nous tracer : car ce n’est point moi qui les ai imaginées, c’est le Sauveur du monde qui dans toute la suite de son Evangile ne nous a parlé d’une vie chrétienne que sous la figure d’un combat, d’un négoce, d’un travail, pour nous faire entendre que ce doit être une vie laborieuse et agissante ; or y a-t-il rien de plus incompatible qu’une vie de travail et une vie de jeu ? […] Parce que dans les nécessités publiques l’aumône coûteroit, et que le jeu en pourroit souffrir, on ne connoît point ce commandement ; on est témoin des miseres du prochain, sans en être ému, ou si le cœur ne peut trahir ses sentiments naturels, l’esprit n’est que trop ingénieux à imaginer des prétextes pour en arrêter les effets ; on est pauvre soi-même, ou volontiers on se dit pauvre lorsqu’il y a des pauvres à soulager, mais on cesse de l’être dès que le moment et l’occasion se présente de jouer.
ne s’imagine-t-il point, & ne lui dit-on pas, qu’en fréquentant les spectacles il se polira, il apprendra les belles manieres & les grands sentimens ? […] Ils ne les effacent jamais de leur mémoire ; … ils y voient des Grands, des personnes élevées en dignité, des vieillards, &c. y applaudir ; ils s’imaginent que tout ce qu’on leur expose est à retenir ; … ils agissent en conséquence, lorsqu’ils jouissent de leur liberté, & les voilà corrompus dans le cœur & dans l’esprit pour le reste de leur vie ; … ils perdent leur innocence sans en connoître le prix ; & néanmoins les parens qui ignorent eux-mêmes combien cette perte est affreuse & irréparable, sont ensuite au désespoir, quand leurs enfans donnent dans des désordres si préjudiciables à leur fortune, & dont ils sont cause, & qui leur fera bien verser de trop justes larmes !
Je l’avoue en gémissant, aucune nation n’a fourni tant de Comédiens & de si habiles, tant de spectateurs & de lecteurs, & de si éclairés ; j’en rougis pour ma patrie, aucune n’a imaginé tant de genres de décoration, de machines, de spectacles, aucune n’enfante tant de musiciens, instrumens, danseurs, sauteurs, machinistes, tabarins, &c. […] Que sont les Lettres Persannes, Juives, Chinoises, Cabalistiques, &c. qu’un ramas de tout ce que la malignité a imaginé de méprisant & d’ironique contre le christianisme ?
Pourroit-on d’ailleurs imaginer ces inflexions sans le discours ?
Les horreurs du théatre de Crébillon rendent brutal, cruel, en porté, sanguinaire ; les friponneries des acteurs de Moliere & de Regnard secouent les scrupules de la probité & la justice, apprennent & font imaginer une infinité de tours d’adresse pour s’emparer du bien d’autrui.
Imagines in templis magna honestate depingi cavetur, et impudicam fœminam Mariæ aut Catherinæ, probosum hominem Augustini, aut Antonii personam sustinere patiamur ?
Il semble que c’est une chose assez inutile de disputer davantage là-dessus, et qu’on peut tout d’un coup retrancher la Question en remontrant, Qu’en ce qui est des Histrions et des Comédiens Romains, Tragiques ou Comiques, les uns ne valaient pas mieux que les autres, et que leurs Pièces les plus modestes avaient des emportements que nous ne saurions approuver ; C’est pourquoi la conséquence que l’on tire de tout ceci en faveur de nos Comédiens, n’est pas fort favorable, de dire, Que puisqu’ils représentent des Tragédies et des Tragi-comédies à l’imitation des Anciens, on les doit tenir dans l’estime comme eux, et assister à leurs Représentations comme à des Spectacles importants ; car si l’on montre que les anciens Comédiens ne faisaient aucune difficulté dans leur Religion de jouer des Pièces de mauvais exemple, on s’imaginera donc que ceux qui sont aujourd’hui de la même Profession prennent une licence pareille ; Que cela se voit dans leurs Pièces les plus régulières, et principalement dans d’autres composées exprès pour être plus libres.
L’intrigue des deux amans est aussi mal imaginée. […] Mais si l’on ne savoit jusqu’où se porte parmi nous le vil esprit d’imitation, d’asservissement aux idées bonnes ou mauvaises, qui ont quelque succès, eût-on jamais imaginé que cette piece, qui fit dans le temps une nouveauté agréable, eût produit le Courier de Henri IV, la Bataille d’Ivri, la Réduction de Paris, &c ? […] Jamais Henri ne fut moins grand qu’à la comédie : on y joue des personnages faux, on leur donne des caracteres imaginaires, on imagine des faits, on fait des anachronismes, pour amener quelques bon mots : ce sont des pompons qu’on attache avec une épingle, pour parer celui qu’on montre dans le jour le moins favorable. […] Cette derniere circonstance, inutile à la piece, imaginée pour faire valoir le zele, l’adresse & le bonheur de Varenne, dont l’auteur se dit descendant (descendance qui décrédite cette historiette).
Mais, Monsieur, si l’on venoit à bout de procurer à cette réforme du Théatre & des Acteurs, plus d’étendue, plus de perfection encore que je n’imagine, les Casuistes austères continueroient-ils toujours de proscrire, comme péchés graves, & la composition d’Ouvrages pour le Spectacle, & l’assistance à leurs représentations ? […] Beaucoup de Poëtes sont capables d’imaginer dans leurs Pieces des évènemens extraordinaires, d’introduire des personnages bizarres qu’on appelle neufs, d’éblouir le parterre par de bruyans coups de Théatre. […] Eriphile joue un personnage odieux, mais savamment imaginé pour amener un dénouement aussi heureux qu’inattendu. […] Ces sortes de Collections de toute espèce, imaginées par l’amour du gain, exécutées sans goût, multipliées sans nécessité, appauvrissent plus la République des Lettres, qu’elles ne l’enrichissent.
Il faut être dans le délire pour imaginer de pareilles chimeres, qui choquent même le costume le plus commun. […] Les actrices iroient y étudier ces antiquités, chercher des graces, y apprendre le costume ; on y trouveroit des modeles de masques pour le bal ; & comme plusieurs modes n’ont été imaginées que pour cacher les défauts, ce magasin donneroit des mouches pour les boutons, du rouge pour la pâleur, des falbalas, des paniers pour, &c. […] Cette répétition monotone de ce qui a été dit mille fois, décele la stérilité du génie, qui ne sait imaginer rien de grand, rien de neuf.
Qu’on se rende justice, les Marquis qui courent le bal, déguisés de mille manieres les plus ridicules qu’ils peuvent imaginer, ceux qui montent sur le théatre de société pour jouer toute sorte de rôles les plus comiques, Arlequin, Pantalon, Scaramouche, &c. tous ces gens-là sont-ils plus sages ? […] Il multiplie les farces à mesure qu’il multiplie les impôts, & qu’il augmente la misere, au lieu de voir que c’est insulter la misere publique, il s’imagine consoler la nation en baladin.
Car si telle n’eût été sa pensée, commew aurait-il imaginé une si grande fourbex ? […] [NDE] Comprendre : et il est plus que Nestorien en cela qu’il s’imagine… w.
D’ailleurs quoy que les Autheurs celebres puissent egayer leur Muse quand il leur plaîst, & que nous en ayons veu de beaux Poëmes Comiques ; depuis que plusieurs autres s’en sont mêlez, ils ont quitté le dé pour deux raisons que ie m’imagine, & que chacun aussi peut s’imaginer. […] Cet article de la depence des Comediens est plus considerable qu’on ne s’imagine. […] L’homme n’est content que par fantaisie, & c’est l’estre assez que s’imaginer de l’estre. […] Quand ces eloges excedent, on s’imagine que l’Orateur en veut faire accroire, & l’on est moins persuadé de ce qu’il tasche d’insinuer dans les esprits. […] Ce qu’il auoit bien imaginé fut prononcé auec vne merueilleuse grace, & ie ne puis enfin dire de luy que ce que i’entends dire a tout le monde, qu’il est tres poli & dans ses discours & dans toutes ses actions.
Et sicut Deus hominem ad vitam per laborem et sudorem vocat, cum sit virtus in arduo posita ; ita ad mortem per delitias et suavitates festinamus, nimirum ad verum bonum aspera via ducit, malorum imagines ad exitium per bona fallacia. […] Objiciuntur enim menti irritabiles formæ, suggeruntur fomenta vitiorum, et ex rerum imagine ac commemoratione cupiditas excitatur, atque simulatis amoribus quasi veris intersint turpi voluptate spectatores ingurgitantur, quasi in sentina volutati. […] Imagines in templis magna honestate depingi jubetur, et impudicam fœminam Mariæ aut Catharinæ, probrosum hominem Augustini aut Antonii personam repræsentare patiemur ? […] Qui autem ex vitio quod in se est delectationem aliquam perceperunt, evidentes domi imagines imprimunt. […] Inter se exequis jaculentur Mauricæ pugnæ genere, qua alterius agminis pars magno impetu primum procurrit, missisque in adversarios arundinibus, jaculorum imagine, pedem referunt ceduntque prementibus adversariis, quos excipit pars altera agminis quasi in subsidiis relicta, hanc ex adversa parte alii, luduc sic continuatur, quæ sunt omnia bellorum imitationes et imagines viribus corporis exercendis idonea dexteritateque comparanda.
Le caractère de ceux qui l’ont imaginé le déprécie, pourquoi dire par les gens de lettres de son tems . […] Les Bacchantes même n’étoient pas habillées de pampres & de lierre ; il faut que Voltaire & sa troupe soient surieusement affectés de l’envie qu’ils s’imaginent qu’on leu porte, & qui n’est que l’injure banale contre tous ceux qui ne l’admirent pas, qui la répétent à toutes les pages ; il y a sans exagération dans les œuvres de Voltaire deux mille traits contre ses ennemis, & tous avec ces propos des hâles ; il est si hors de lui-même, qu’on le prendroit pour une harangere.
Cette variation sur la longueur des cheveux, fit imaginer un moyen pour procurer le double avantage de jouir quand on voudroit, des cheveux longs & des cheveux courts. […] L’histoire de la barbe fait voir que la mode n’a pas moins exercé ses caprices sur la barbe que sur la chevelure ; on lui a donné toutes sortes de formes, ronde, quarrée, pointue, en éventail, en queue d’hirondelle, & en cent autres manieres ; pour tenir la barbe dans ces formes diverses ; on imagina des cires préparées, sur lesquelles la barbe s’appliquoit & se tenoit ferme ; on les déguisa, on leur donna la couleur & l’odeur qu’on voulut.
Ce n’est que depuis qu’on a imaginé qu’il falloit soutenir par la pompe des habits une autorité que l’irréligion affoiblit tous les jours dans l’esprit des peuples, que la majesté des queues est devenue d’étiquette. […] C’est que dans le monde, où tout n’est que décoration & comédie, on fait un objet important des choses les plus indifférentes, lorsqu’on s’imagine que bien ou mal elles servent la vanité.
Après avoir rapporté sur le ton le plus tragique ; le procès de Calas, de Sirven, de Montbailli, & tout ce qu’il lui a plus d’imaginer, il finit par ces paroles : Quelle suite infernale d’horribles assassinats ! […] Peut-on imaginer de telles puérilités ?
Voici comme j’imagine que pourrait s’exécuter ce nouveau Projet. […] Elle avait les Rôles tendres dans le Tragique & dans le Comique : le Ciel l’avait douée d’un organe propre à remuer les cœurs, avec une beauté qui se les attachait ; son nom signifie encore, tout ce que l’on peut imaginer de plus touchant.
En effet, quelle extinction de piété, et quel renversement de raison n’est-elle pas capable de produire dans l’esprit d’une fille, quand elle voit épouser par Chimène celui qu’elle appellait auparavant « L’autheur de ses malheurs, et l’assassin de son père. » Car ne pourra-t-elle pas s’imaginer que les devoirs les plus essentiels et les plus indispensables d’une fille à l’égard de son père, doivent céder à la passion d’une amante volage et inconsidérée ? […] « Tu n’as fait le devoir que d’un homme de bien. » L’on ne saurait aussi s’imaginer quelle impression sont capables de faire sur l’esprit d’un jeune homme ces Vers de la même Pièce dits par un père à un fils, pour le porter à se venger d’un ennemi.
Jamais le prétexte de faire goûter la saine morale ne leur a fait imaginer un rôle de Confucius par ceux-mêmes qui veulent faire accroire qu’on ne lui rend qu’un culte civil. […] Les Auteurs s’imaginent qu’ils ne sauraient plaire, s’ils se renfermaient dans la vérité historique, et la Baumelle (Vie de Madame de Maintenon) prétend que la tragédie d’Esther, si brillante à S.
Mais ils auraient dû prévoir qu’en montant la Cour et la capitale sur ce ton, c’était donner le branle à tout le royaume, qui ne manque pas de suivre les exemples, surtout quand ils favorisent le vice, et qui en effet dans ces folies de la scène a passé tout ce qu’on pouvait en imaginer. […] Les Historiens du temps en donnent plusieurs raisons, ou plutôt les imaginent. 1.° Les pièces composées dans le bureau de l’Eminence, et par elle en partie, étaient, comme de raison, pleine d’éloges flatteurs « du Ministre, du ministère, du pouvoir absolu des Rois, même sur leurs plus proches », la Reine douairière, le Duc d’Orléans, le Comte de Soissons, (Bibliothèq. de Sorel) : quels sons plus harmonieux pour son oreille !
Le voyage dans un pays inconnu, ou le Temple de la piété (il fallait dire au temple), livre nouveau, où le sieur Compan tâche d'égayer la piété par de petites aventures, comme le voyage de Jean de Palafox, les romans immenses de l'Evêque du Bellay, d'un Minime d'Avignon, le château de l'âme de Sainte Thérèse ; ce pieux Roman trouvant la piété ennuyeuse, malgré toutes ces aventures, imagine de la faire divertir au théâtre, et lui forme jusque dans son temple la cour la plus singulière ; il lui donne pour favoris Borromée, François de Sales, Corneille et Racine. […] On est si accoutumé à n'y entendre que des mensonges, qu'on n'imagine pas y trouver une vérité : du solide dans le pays des fables !
Il est absurde d’imaginer que des danses introduites dans un Poème, seront plus supportables quand elles n’auront aucune liaison avec l’intrigue. […] pourquoi n’y verrait-on pas, ou ne s’imaginerait-on pas y voir, ces changemens subits de traits & de couleurs, qui dénotent ce qui se passe dans notre intérieur ? […] Afin de donner le même caractère au visage de plusieurs Danseurs, on est contraint d’employer les masques ; la figure ingrate de quelques Elèves de Therpsicore, a fait imaginer aussi un pareil èxpédient.
C’est dans ce chemin rude qu’il faut marcher, & souffrir beaucoup de peines & d’afflictions pour entrer dans la vie éternelle. » Il y a cependant des Ecclesiastiques qui ne font point de scrupule d’aller à l’Opera, & ceux mêmes d’entre eux qui croïent que la Comedie, les farces, les bousonneries & les autres spectacles vains & profanes leur sont défendus, s’imaginent que celui-ci leur est permis. […] Ils voïent & ils connoissent tout le monde, sans estre vûs ni connus de personne ; semblables en cela aux petits enfans qui se sont une grande joïe de s’imaginer, quand ils se cachent le visage de leurs mains, qu’on ne les voit point, & que cependant on les cherche. […] Mais afin qu’on ne s’imagine pas que les sentimens des saints Peres soient outrez & trop severes, je veux bien rapporter ici le témoignage de deux grands hommes ; dont l’un a vêcu assez long-temps dans le beau monde, & l’autre a esté marié & a passé plusieurs années à la Cour, & qui par consequent méritent bien qu’on le croïe fut ce sujet.
Parce que la Comédie est une peste des plus pernicieuses qu’on puisse s’imaginer, et qu’il n’y a rien qui gâte plus les bonnes mœurs et la simplicité naturelle du peuple. […] Ces actions, disent-ils, nuisent beaucoup aux Régents, et à leurs disciples ; Aux Régents en ce qu’elles leur ôtent trois ou quatre mois du meilleur temps qu’ils aient, soit pour composer quelque nouvelle pièce, soit pour exercer les Acteurs ; et aux Ecoliers, en ce qu’elles dissipent leurs esprits, interrompent le cours de leurs études ; et non seulement les rendent plus paresseux à s’acquitter ensuite de leurs devoirs, mais aussi beaucoup plus fiers et plus indociles ; parce qu’ils s’imaginent qu’ils sont nécessaires, et qu’on ne peut se passer d’eux. […] Il ne faut donc pas s’imaginer qu’il n’y a que des Moines qui soient obligés de mener une vie sainte et réglée, et que les gens du monde peuvent licitement se divertir durant toute leur vie.
Peut-on rien imaginer de plus horrible qu’un pareil caractere !
Cependant vers la fin de la piéce, elle imagine de demander aux deux Princes, ses amans, qu’ils la vengent, en égorgeant leur mere, de la mort de leur pere.
Il est aisé d’imaginer combien elles enfantent de faux préjugés dans les jeunes gens, & même parmi le commun des spectateurs.
Si Madame de Maintenon qui avoit contribué à l’en éloigner, avoit voulu l’y ramener, elle eût combattu ses propres principes, & détruit ses exhortations : elle imagina d’avoir un théatre chez elle, où le choix des piéces, ma décence des représentations, la pieté des acteurs & des actrices, écartant les dangers des spectacles publics, pussent calmer les allarmes que donne la vertu.
Or, Monsieur, puisqu’il est presque impossible de traiter cette matière sans appeler le christianisme au secours, Dieu qui connaît si bien la faiblesse des hommes, ne leur a pas dit pour rien, soyez sur vos gardes, veillez et priez, pour ne point entrer en tentation, imaginez-vous que l’ennemi est toujours aux portes ; ce qui est, ce me semble, une manière d’avis au Lecteur ou au Spectateur, comme vous voudrez, des Tragédies, dans lesquelles on se livre de gaieté de cœur à la représentation des passions.
Oui : car l’on voit que tout ce qui se représente pour l’ordinaire en tels Jeux, sont des pièces d’amour déshonnête qui paraît avec la plus grande effronterie qui se puisse imaginer, et se débite avec tant d’art et d’adresse affectée, qu’il ne fait pas peu d’impression sur l’esprit des spectateurs, et dont ils peuvent retenir de très pernicieux exemples.
Imaginez-vous donc de voir d’abord paraître une Vieille, qu’à son air et à ses habits on n’aurait garde de prendre pour la mère du maître de la maison, si le respect et l’empressement avec lequel elle est suivie de personnes très propres et de fort bonne mine ne la faisaient connaître. […] Tout cela fait un effet admirable, en ce que croyant parfaitement convaincre son Beau-frère de la beauté de son choix et de la justice de son amitié pour Panulphe, le bonhomme le convainc entièrement de l’hypocrisie du personnage, par tout ce qu’il dit ; de sorte que ce même discours fait un effet directement contraire sur ces deux hommes, dont l’un est aussi charmé par son propre récit de la vertu de Panulphe, que l’autre demeure persuadé de sa méchanceté : ce qui joue si bien, que vous ne sauriez l’imaginer. […] Il continue ; et supposant que ce qu’il s’imagine est une vérité, il dit qu’« il la veut marier avec Panulphe, et qu’il croit qu’elle lui obéira fort volontiers quand il lui commandera de le recevoir pour époux ». […] Objection admirable dans la nature des bigots, qui n’ont qu’emportement en tout, et qui ne peuvent s’imaginer que personne ait plus de modération qu’eux.
Catulus imagina le premier cette commodité ; car il fit couvrir tout l’espace du Théâtre & de l’Amphithéâtre de voîles étendues sur des cordages, qui étaient attachés à des mâts de navires, ou à des troncs d’arbres fichés dans les murs.
Voici comme j’imagine que devraient être les Spectacles de Paris, pour que leurs adversaires n’eussent plus rien à leur reprocher.
Je n’ai jamais pu concevoir quel plaisir on peut prendre à imaginer et à composer le personnage d’un scélérat, à se mettre à sa place, tandis qu’on le représente, à lui prêter l’éclat le plus imposant.
Ce saint Docteur examine d’abord, dans l’Homélie 15. au peuple d’Antioche cette question, si c’est un péché d’aller à la Comédie, par ces paroles : « Plusieurs s’imaginent qu’il n’est pas certain que ce soit un péché de monter sur le Théâtre, et d’aller à la Comédie : mais quoiqu’ils en pensent, il est certain que tout cela cause une infinité de maux ; car le plaisir que l’on prend aux spectacles des Comédies, produit l’impudence, et toutes sortes d’incontinences.
Ce nom est risible, Philinte, Araminte, Ergaste, Valere, &c. sont des noms de personnages de comédie, imaginés par des poëtes dramatiques, dont Abaillard n’eut jamais l’idée. […] Cet homme étoit amateur du théatre, & singuliérement idolâtre de Térence, il vouloit inspirer ce goût à tout le Clergé, à la vérité il ne fit pas bâtir de théatre public, & n’appella point de troupe de comédiens, qui n’ont jamais brillé dans le Querci ; il auroit par un tel éclat, reveillé l’Evêque Chartreux, trop dévot pour aimer la comédie, qui vraisemblablement l’eût condamné ; mais il imagina de faire étudier les comédies de Térence dans le Seminaire ; il fit entendre à l’Evêque que pour faire entendre le Latin d’Akempis à ses Ecclésiastiques, il faloit les obliger d’apprendre les bons poëtes Latins, Virgile, Horace, & sur-tout Térence.
Tout le monde aime la volupté, sur-tout la jeunesse qui s’imagine lui être consacrée ; les Poëtes & les Peintres peignent la volupté comme une jeune personne couchée sur un lit de fleurs, environné de tout ce qui flatte les sens ; toutes les passions bouiliantes à cet âge où la chair vigoureuse qui n’a point encore été mortifiée, domine avec insolence, & s’en fait même un privilège, & rien de plus ordinaire au théatre & dans le monde que de dire que la sagesse n’est faite que pour les vieillards, & le bel âge pour les plaisirs ; ceux qui ont des inclinations plus heureuses n’osent les suivre, le respect humain l’entraîne dans la foule, il est emporté par le torrent & on les excuse. […] Il est difficile d’imaginer chose quelconque plus propre à donner occasions à l’impureté que les danses, n’y eut-il point d’instrument qui sonne les notes ?
Je doute qu’on voulût, pour affermir sa santé, faire les épreuves du Roi de Pont, & on s’imaginera devenir charitable à force de barbarie, & chaste à force d’incontinence ! […] J’avoue ma foiblesse à tous les beaux esprits, à tous les esprits forts, je n’applaudirai jamais, quelque brillans qu’ils soient, à des lauriers que ceux qui en sont couronnés sont obligés d’arracher de leur front & d’arroser de leurs larmes ; je n’imaginerai jamais que l’Académie Françoise, indifférente à la religion & aux bonnes mœurs, puisse couronner les Contes de la Fontaine, les Lettres Persannes, l’Uranie de Voltaire, les Contes, l’Apologie de Marmontel.
On lui applaudit, on le trouve heureux de se connoître si bien en plaisirs, & de savoir imaginer tant de tours, pour goûter des momens délicieux. […] On croit d’abord le mal, on l’imagine ; les préventions que donne le théatre le font supposer par-tout, on le sent plus vivement par la crainte des excès & du ridicule dont on vient de se remplir.
Leur grand mérite est d’imaginer des divertissemens, des spectacles comiques, où elles excellent. […] En France, où on ne se contente pas de prendre & de dire les choses comme elles sont, mais où l’on canonise ses goûts pour s’en faire un mérite, on a imaginé un systême d’amour, qui, dit on, n’est point un libertinage, qu’on érige presque en vertu, & dont on veut que la scène ne puisse se passer.
Imaginez-vous de prétendues comédies sans unités, sans intérêt ; pour tout sel des obscénités claires, ou ce qu’on appelloit autrefois des quolibets et qui se nomme aujourd’hui des calembourgs ; figurez-vous des danses dénuées de caractère, et exécutées par de foibles enfans qui s’excédent, des pantomimes monstrueuses, mélanges de bouffonnerie et d’héroïque, dans lesquelles il y a toujours des duels, des coups de canon, des supplices, et souvent des hommes métamorphosés en chats, en chiens, en ours, en singes. […] Imaginez-vous l’impression que doivent faire sur de jeunes sens leur coëffure printanniere, leurs cheveux parsemés de fleurs et de brillans, leur sein découvert, leur dos nud le médaillon de leur amant, placé sur le cœur.
La maison paternelle n’échappa point à ce ridicule ; ils ne virent plus que des tyrans dans les respectables auteurs de leurs jours, et s’imaginèrent, pour combler la mesure, que le hasard, ou un génie tutélaire, leur révélerait un jour une naissance illustre. […] Afin de ne point s’égosiller à commander les manœuvres, il imagina le double rang de pavés, derrière lequel, au roulement d’usage, ces braves s’alignaient sans fatiguer les poumons de leur chef, qui rentrait chez lui après la parade ; et une heure après, d’autres parades assemblaient sur la même place les enfants, les oisifs et tout ce que Paris renferme de badauds de tous pays.
» Ceux qui s’y plaisent en reviennent l’imagination pleine des plus vives images de ces folies : « Evidentes domi imagines imprimant. » Ceux même qui en sont peu touchés perdent du moins leur temps à des plaisirs fort inutiles. […] » Peut-être, comme les Païens qui croyaient honorer par là leurs Divinités, nous imaginons-nous que ces fêtes sont agréables à Dieu.
Attentif à profiter du goût des hommes pour les vanités du monde, il les leur présente sous la forme des Spectacles les plus séduisants, et il triomphe de leur défaite, dans le temps même qu’ils s’imaginent être à l’abri de ses fureurs et de ses traits. « Et ostendit ei omnia regna mundi, et gloriam eorum. […] où l’on s’imagine être vivant, et où l’on est véritablement mort, état où l’on persévère ordinairement jusqu’à la fin des jours, état qui est celui du plus grand nombre ; et Dieu veuille, mes Frères, que ce ne soit pas le vôtre, et qu’actuellement même que je vous fais voir le danger des Spectacles, vous ne murmuriez pas en secret contre la sévérité de cette morale, comme si elle n’était pas celle de l’Evangile, et comme si j’exagérais sur cette matière, uniquement à dessein de vous effrayer.
Mais comme la charité doit être bien ordonnée, parce qu’il ne suffit pas de faire de bonnes œuvres ; mais qu’il les faut encore bien faire ; ne vous imaginez pas qu’en faisant tant d’aumônes, ce Prince ait omis de payer ses dettes, et de satisfaire à ses autres obligations. […] Autre illusion de l’Auteur de la Dissertation en ce qu’il s’est imaginé qu’il y avait des Tragédies, et des Comédies du temps des enfants de Caïn. […] : « Il ne faut pas s’imaginer que la défense que nous faisons aux Chrétiens d’assister aux Spectacles du Paganisme ne soit qu’une invention de la subtilité de l’esprit. […] Cependant il s’aveugle tellement qu’il ne prend pas garde qu’il tire la plus fausse conséquence qu’on puisse imaginer, et qu’il établit sans aucune preuve un principe et une maxime dont la fausseté est si visible, qu’il n’y a pas lieu d’en douter : car voici son principe. […] Vous savez que le monde donne d’ordinaire des applaudissements et des louanges à ces sortes de gens : car comme dit l’Écriture, on loue le pécheur de ses passions ; et on bénit le méchant à cause de ses méchancetés. » L’Auteur de la Dissertation ne doit pas s’imaginer qu’à cause que S.
Tout homme de sens est indigné en voyant de pareilles fadaises admirées, & les badauds attendris, s’imaginer qu’ils ont vu l’image de la vie champêtre.
Elle est fille de Maître et dès son enfance elle a été dressée à cette profession où elle a réussi avec des avantages incomparables, son Père est un des principaux de la troupe de qui cette fille est la prunelle de l’œil il en est plus jaloux que de sa femme, et ne vous imaginez pas que cette fille soit autre chose qu’une perle de vertu car outre que son Père et sa mère la veillent comme des dragons elle a toujours eu une inclination si forte à la pureté et à la piété que tous ceux qui ont voulu donner des atteintes à son honnêteté n'y ont perdu que leurs pas et leurs espérances.
Dans cette disposition de tous les sens, ou gagnés ou captifs, et d’un cœur si près de l’être, on voit paraître sur la scène un nombre choisi d’acteurs parés avec tout l’artifice que l’esprit du monde peut imaginer pour séduire, et qui ajoute à l’artifice, tout ce que la passion qu’ils expriment peut inspirer.
On n’y fait plus aussi paraître de femmes toutes nues ; mais celles qu’on y fait paraître, n’y montrent encore que trop de leur nudité ; et leurs parures, leurs gestes, leurs allures mesurées, et toutes leurs autres manières étudiées sur le tendre, donnent à la vérité moins d’horreur, mais elles n’inspirent peut-être pas pour cela moins d’amour : et si on n’y commet plus les dernières infamies, on y tient au moins des discours, surtout dans les farces, qui en font assez imaginer. […] Mais parce que peut-être le parterre pourrait se laisser surprendre, en ne démêlant point assez le faux et l’imaginé du véritable, il est à propos de temps en temps de lui lever le masque et de découvrir les fictions, surtout quand il les pousse trop loin, comme il fait encore ici, lorsqu’il ajoute que Tertullien a reconnu que la Comédie était une chose indifférente, et qu’elle n’était pas plus mauvaise que les Anges, le fer et les herbes ; car ce paradoxe n’est pas moins injurieux à Tertullien que celui qui vient d’être développé, et il va paraître du moins aussi téméraire. […] Mais ce sont là de ces libertés de Théâtre qui ne laissent pas d’être honnêtes, et de ne blesser en rien le Christianisme, ainsi que parle le Docteur ; mais peut-il s’imaginer qu’on l’en croira sur sa parole ? […] Mais afin qu’il ne s’imagine pas encore après cela, que les Magistrats autorisent les Comédiens en France, il n’a pour se désabuser qu’à consulter les Registres du Parlement de Paris, il verra comme ils y sont traités, et il y trouvera plusieurs Arrêts qui leur défendent de jouer, « à peine d’amende arbitraire et de punition corporelle, quelques Permissions qu’ils eussent impétrées ». […] Que notre Docteur apprenne donc mieux son Un seul Dieu, qu’il s’en fasse expliquer le troisième Précepte, qui ordonne la sanctification du Dimanche : mais surtout, qu’il se garde bien de plus s’imaginer qu’en allant à la Comédie le Dimanche, on imite Dieu dans son repos ; c’est une proposition qui n’est point éloignée du blasphème, et qui marque une ignorance très crasse du sens des paroles de la Genèse, qui ne veulent dire autre chose sinon que le septième jour Dieu acheva et mit fin à l’ouvrage de la Création.
Qu’on imagine la phrase, où ces qualités se trouvent dans le dégré le plus éminent ; qu’on en sépare les idées des mots, & qu’on cherche ensuite, dans ces derniers, ces qualités qui nous subjuguoient avec tant d’empire.
Imaginez la Comédie aussi parfaite qu’il vous plaira. […] Pour rendre cette vérité sensible, imaginons un dénouement tout contraire à celui de l’Auteur. […] Ce mot même de Tribunal était mal imaginé : j’aimerais mieux celui de Cour d’honneur. […] Je n’imagine qu’un Spectacle plus simple et plus terrible encore ; c’est celui de la main sortant du mur et traçant des mots inconnus au festin de Balthazar. […] [NDA] Il me paraît plaisant d’imaginer quelquefois les jugements que plusieurs porteront de mes goûts sur mes écrits.
Il ne faut pas s’imaginer qu’on pense librement chez une Nation où le Théâtre est encore soumis à des loix arbitraires, tandis que la Presse est libre ; & ce n’est pas à la fin du dix-huitième siècle, que des François peuvent contester l’extrême importance du Théâtre. […] Si l’on ne savoit combien les Ministres Anglois ont de moyens de corrompre les membres du Parlement ; si l’on ne savoit combien il leur est facile de déterminer, en leur faveur, la pluralité des voix, il seroit impossible d’imaginer qu’une Nation qui se croit libre & qui se vante de penser, jouisse de la liberté de la Presse, sans jouir en même temps de la liberté du Théâtre.
Benoît XIV nimoit beaucoup à se promener, il imagina d’aller tous les soirs aux quarante heures pour avoir occasion de sortir ; il n’a d’autre divertissement que d’aller passer le tems des chaleurs à Castel-Gandolfe, où il respire un meilleur ait, avec un peu plus de liberté. […] Jotof étoit âgé de 80 ans, le Czar imagina de lui faire épouser une veuve de son âge, & de célébrer solemnellement cette noce ; il fit faire l’invitation par quatre begues, des vieillards décrépits conduisoient la vieille mariée ; quatre des plus gros hommes servoient de coureurs, la musique étoit sur un char, conduit par des ours qu’on piquoit avec des pointes de fer, & qui par leur mugissement formoient une basse digne des airs qu’on jouoit sur le chariot.
C’est sans doute sur cette fable qu’a été imaginée une autre fable de la Fontaine de Jouvence, qui rajeunissoit ceux qui en buvoient. […] Peut-on imaginer de plus monstrueux assemblage de sacré & de profane, de vice & de vertu, d’instruction & de scandale ?
Il y avoit dans ses états quelques Nains en petit nombre, venus apparemment des Lapons qui sont à l’extrêmité du côté du Nord, il imagina d’en former un peuple, fit chercher des Nains pour les unir, comme des chevaux dans des haras ; il en eut en effet quelques-uns qui depuis se sont multipliés, ces poupées sont aujourd’hui assez communes dans la Russie. […] Jamais une vierge n’a imaginé de se farder pour plaire, pour inspirer des désirs, pour avoir des amans ; ces moyens sont peu efficaces pour conserver la pareté, les Actrices qui se serviront de l’essence virginale seront toutes vierges. 2.° Les Perruquiers vont de pair avec les Médecins, ils sont devenus Censeurs des médicamens & donnent leurs approbations légales à des essences ; celle-ci peut intéresser la santé, puisqu’elle fait rentrer les boutons, ce qui doit altérer la masse du sang ; des boutons rentrés peuvent occasionner des maladies.
Un nombre infini de personnes se rendent à un lieu marqué ; personne ne s’y connoît tout le monde est masqué, chacun à son gré, de la maniere la plus bisarre, la plus grotesque, la plus extravagante qu’il a pu imaginer. […] Pour perpétuer & multiplier ces bruyans & fatigans plaisirs, on a imaginé des Vauxhals, où ils sont tous rassemblés ; nous en avons souvent parlé ailleurs, je n’en parle ici que pour celébres leur nouveau triomphe.
Dryden pour se laver de ces reproches, est trop heureux d’abandonner enfin son principe. « De peur qu’on ne s’imagine, dit-il, que j’écris ceci pour rendre aimable le libertinage, et que je m’embarrasse peu d’avilir la fin et l’institution de la Comédie, (le plaisir n’en est donc pas la fin principale) je déclare nettement que nous ne faisons heureux les hommes vicieux, que comme le Ciel laisse heureux les pécheurs etc. […] Ce Sancho tout grand guerrier qu’on le fait ne connaît rien au nom de Héraut d’armes qu’on lui donne : il s’imagine qu’on l’appelle Hérode ou de quelque autre nom de Juif.