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55. (1758) Lettre à M. Rousseau pp. 1-42

il doit savoir écouter ; et je sens que je l’estime assez pour trouver dans mes sentiments le don de l’engager à m’entendre. […] Ce n’est pas le mal qu’elles vous ont fait, qui vous donne ces sentiments furieux : c’est le mal que vous souffrez, qui, s’emparant de votre esprit comme de vos sens, vous porte à des fureurs…. […] Si vous étiez en bonne santé, si vous aviez les sens tranquilles, la vue libre, vous vous rendriez à une conclusion qui justifie un plaisir. […] Oui, j’avoue que dans l’absence de la raison, dans ces moments que la nuit soumet à l’erreur, la femme que vous peignez s’est quelquefois offerte à mes sens…. […] Non, Madame, ils ne me diront rien, car je ne les interrogerai pas ; je devine tout, je sens que j’ai trop douté, et mon cœur vole vers vous pour expier tous mes crimes… etc. etc.

56. (1715) La critique du théâtre anglais « CHAPITRE V. Remarques sur L’Amphitryon, Le Roi Arthur, Don Quichotte et Le Relaps. » pp. 302-493

est le plus hardi caractère dans le sens dont je parle, après celui du Jupiter de Plaute. […] Les emportements tragiques de Térée et de Thyeste sont à notre sens, de véritables extravagances. […] La différence des sens ne change pas la nature du crime au point que vous vous l’imaginez peut-être. […] comment comprendriez-vous le sens de ces paroles ? […] [NDE] Mot qui avait le même sens que courir à l'époque (voir les dictionnaires de Nicot et de Féraud.

57. (1643) Les Morales chrétiennes « Des Théâtres. » pp. 511-519

Néanmoins ces espèces sont mortes et trop limitées, pour rendre nos sens et nos esprits satisfaits ; c’est pourquoi les Théâtres entreprennent d’achever, ce qui manque à tous ces arts, et de nous faire voir les choses éloignées, avec des expressions plus vives, qui emportent même quelques avantages sur le naturel. […] Si la chasteté demande les retraites, les solitudes, les pénitences, comme son élément ; si elle ne gagne ses victoires, que par la fuite des occasions ; si avec tous les secours de la vertu, elle se trouve empêchée de se conserver contre les révoltes intérieures de l’appétit animal, comment peut-elle demeurer entière dans les comédies, où elle est battue par tant de machines, et vaincre dans une presse, où tous les objets des sens et de l’esprit se liguent contre elle ?

58. (1772) Sermon sur les spectacles. Pour le Jeudi de la III. Semaine de Caresme [Sermons pour le Carême] « Sermon sur les spectacles » pp. 174-217

Le monde, en effet, a-t-il rien nulle part de plus attrayant pour les sens par la pompe & la magnificence qui les décorent ? […] nous-mêmes, mes Freres, nous vous l’avouons, poursuit ce sage Archevêque, au centre du recueillement où nous vivons, à peine pouvons-nous captiver devant Dieu notre esprit, notre cœur & nos sens. […] Toute austere que soit cette morale, elle ne peut donc paroître outrée qu’à ceux qui ont oublié qu’être Chrétien & crucifier sa chair, mortifier tous ses sens ; être Chrétien & porter l’esprit de recueillement & de retraite jusqu’au milieu du monde ; être Chrétien & penser sans cesse à l’éternité, soupirer jours & nuit après le Ciel ; être Chrétien & conformer toute sa vie au modèle d’un Dieu crucifié, c’est essentiellement la même chose. […] Et tout cela sur-tout mis en usage pour intéresser le spectateur à l’intrigue d’une passion, pour faire entrer dans l’ame du spectateur la folle passion du héros prétendu que l’on feint enflammé ; & tout cela mis sous les yeux, celui de tous les sens qui fait toujours les plus fortes impressions dans l’ame. […] C’est quelque-fois un jeune dissolu plongé dans le désordre ; c’est un vieux Mondain qui va y rechercher l’image de ses anciennes miseres & tâcher d’y rallumer les étincelles du feu qui l’a brûlé ; c’est une femme livrée aux plaisirs, esclave de ses sens, idolâtre d’elle-même.

59. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Avertissement. » pp. -

Avec trop de régularité on mérite le reproche que Pline le jeune faisoit à un Orateur de son tems : « Il n’a pas d’autre défaut, disoit-il, que celui de n’en avoir point ; & c’en est un très-grand. » Il n’y a guére d’homme de sens qui ne préférât des traits de génie, suivis de quelques fautes, à une composition qui ne seroit que réguliére. […] Que de sens dans ces mots d’un Roi de Perse : Veux-tu faire mieux que tu ne peux !

60. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre XI. De l’amour & de ses impressions dans le Poéme Tragique. » pp. 165-178

On y semble, dit Scaliger, plus attentif à endormir nos sens dans la langueur de la satiété, qu’à rallumer notre curiosité. […] Leurs sens émoussés par les plaisirs-mêmes, sont insensibles à leur ivresse.

61. (1689) Le Missionnaire de l’Oratoire « [FRONTISPICE] — Chapitre » p. 12

Combien plus grand doit être le danger quand vous voyez des femmes auprès de vous, non en passant, mais fixement, en repos et à loisir, des deux et trois heures entières, des femmes affétéesc, bien parées et curieusement ajustées, qui par des contenances étudiées, par les mouvements de la danse, avec les charmes des instruments, flattent vos sens et vous provoquent à la lubricité.

62. (1759) Remarques sur le Discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie « Remarques sur le discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie. » pp. 350-387

En montrant combien il est dangereux, ils ont fait voir pourquoi il est agréable, parce qu’en effet ce qui en fait le plaisir est ce qui en fait le danger ; & qu’on peut dire presque toujours, que la meilleure Piece en un sens est en un autre sens la plus mauvaise. […] Un Poëte vertueux ne prend la route des sens que pour aller à la raison ; & c’est par-là selon Horace, qu’il atteint à la perfection de son Art. […] Il est vrai que tout l’art & toute la perfection de la Tragédie consiste en un sens dans une imitation sçavante & fidele, ensorte que le Poëte qui imite le mieux, est aussi celui qui nous plaît davantage. […] Je sens naître dans mon cœur des mouvements de respect & d’admiration : ce n’est plus seulement l’Art qui me frappe, c’est l’objet même que l’Art me présente. […] L’aversion qu’ils ont pour la contention & le travail les éloigne des premiers, & le goût qu’ils ont pour ce qui affecte les sens & l’imagination les porte vers les derniers.

63. (1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre IX. Des mouvements déréglés du corps qui se font dans la danse. » p. 36

Mais si le mouvement du corps est accompagné de quelque sentiment lascif, et impudique ; ou si on s’en sert pour éveiller la sensualité, et pour exciter, ou entretenir quelque mauvais plaisir, ou quelque satisfaction dangereuse dans la chair, et dans les sens ; le même Docteur Angélique nous apprend que c’est un péché mortel ; et saint Bonaventure, Angélus, Roselius, et Sylvestre, après Alexandre de Halès, sont de même avis.

64. (1731) Discours sur la comédie « PREMIER DISCOURS SUR LA LETTRE DU THEOLOGIEN DEFENSEUR DE LA COMEDIE » pp. 2-32

« Je me sens accablé, dit-il dès la deuxième page, par un torrent de passages, de Conciles et de Pères, qui depuis le premier jusqu’au dernier ont tous fulminé contre les spectacles, et ont employé la ferveur de leur zèle, et la vivacité de leur éloquence pour en donner une si grande horreur aux fidèles, que les consciences faibles et timorées ne veulent pas même qu’il soit permis d’en disputer, et traitent de pernicieux et de relâchés, les Docteurs qui ont l’indulgence de les tolérer. » I. […] Mais de quels mouvements dans son cœur excités, Sentira-t-elle alors, tous ses sens agités ?  […] Là de nos voluptés, l’image la plus vive, Frappe, enlève les sens, tient une âme captive, Le jeu des passions saisit le spectateur, Il aime ce qu’il hait, et lui-même est Acteur ; D’un Héros soupirant là chacun prend la place, Et c’est dans tous les cœurs que la Scène se passe. […] Statut 23. et dans ceux de Grenoble en 1690. dont l’article 5. du premier titre commence ainsi : « Rien n’étant plus contraire à l’esprit du Christianisme que les Bals et les Comédies, etc. » Qu’il ne peut être excusé sur ce qu’ont dit quelques Scholastiques, dont il ne prend pas bien le sens comme nous le verrons au premier jour, et qui d’ailleurs ne font pas la règle de la discipline Ecclésiastique.

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