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100. (1838) Principes de l’homme raisonnable sur les spectacles pp. 3-62

Pour en juger sainement, il faudrait, avant tout, savoir les efforts qu’ont fait ces Guides charitables pour ouvrir les yeux à des aveugles volontaires et pour ramener au bien des mondains obstinés. […] Ils savaient combien on aime à s’aveugler soi-même, et combien la passion est ingénieuse à se cacher ses progrès qui ne deviennent ensuite que trop sensibles. […] Je ne sais là-dessus comment les auteurs s’y prennent ; mais je vois que les spectateurs sont toujours du parti de l’amant faible, et que souvent ils sont fâchés qu’il ne le soit pas davantage. […] Le savoir, l’esprit, le courage ont seuls notre admiration ; et toi, douce et modeste Vertu, tu restes toujours sans honneurs ! […] A la faveur de je ne sais quelles commodes suppositions, on les rend permis ou pardonnables.

101. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Suite de Mêlanges. » pp. 84-120

Une autre différence singuliere entre ces deux hommes que Louis XIV. aimoit, Mignard sut ennobli de la maniere la plus honorable ; Moliere demeura toujours dans l’infamie du Théatre. […] Le Brun a su ériger en académie ces barbouilleurs, & Sahalin les tailleurs. […] Les Tailleurs, qui savent si bien assortir les couleurs & tailler les étoffes, réussiroient-ils moins dans cette partie de la peinture & de la sculpture dont ils sont chargés ? […] Chacun sait que ceux qui déclament ne sont nullement pénétrés de ce qu’ils disent, & que chacun par conséquent ne se met point en peine de réformer ses mœurs sur des impostures. […] Tout le monde sait que la Bejard, qui en jouoit le rôle, étoit sa femme, & que sa coquetterie & les caresses des Seigneurs de la Cour, le rendirent furieux, & le brouillerent avec elle.

102. (1790) Sur la liberté du théatre pp. 3-42

On sait combien les soldats recherchent la garde des spectacles, qui leur vaut un surcroît de paie. La multiplicité des spectacles ne sauroit donc être dangereuse. […] On sait combien le peuple est avide des ouvrages prohibés. […] Tout le monde sait que M. […] Les enfans savent que Mazarin disoit des François : « ils chantent ; ils paieront ».

103. (1824) Du danger des spectacles « DU DANGER DES SPECTACLES. » pp. 4-28

L’âme est jetée dans le corps pour y faire un séjour de peu de durée ; elle sait que ce n’est qu’un passage à un voyage éternel, et qu’elle n’a que le peu de temps que dure la vie pour s’y préparer : les nécessités de la nature lui en ravissent une très grande partie ; il ne lui en reste que très peu dont elle puisse disposer ; mais ce peu qui lui reste l’incommode si fort et l’embarrasse si étrangement, qu’elle ne songe qu’à le perdre. […]  » *** Tillotson, archevêque de Cantorbéry sous le règne de Guillaume III, dit, à propos des représentations théâtrales : « On ne saurait les tolérer. […] « Je ne sache pas de parole du Sauveur des hommes qui s’applique plus rigoureusement à des chrétiens et qui touche de si près à leur salut, que celle-ci : “Bienheureux ceux dont le cœur est pur, parce qu’ils verront Dieu. […] Veillez, car vous ne savez pas l’heure où le Seigneur viendra vous visiter ! […] Heureux, alors, heureux ceux qui auront su être sages à temps, qui, renonçant à des plaisirs captieux et funestes pendant ce court passage qu’on appelle la vie, auront persévéré, avec l’aide de Dieu, dans l’accomplissement des divers devoirs qui leur ont été assignés, qui n’auront cessé de rendre à l’auteur de tout bien de dignes et pieuses actions de grâces pour les bénédictions non méritées que, dans sa bonté paternelle, il a daigné répandre sur eux !

104. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE X. Des six parties de la Tragédie, suivant Aristote. Examen de ces six parties dans Athalie. » pp. 260-315

Il y a une très-grande part sans le savoir. […] Voilà ce que sait faire un grand Poëte. […] On sait, avant que de voir Pyrrhus, qu’il n’est jamais le maître de lui-même, & qu’il essuie les pleurs qu’il fait couler. […] Il faut donc que le Poëte qui a su rendre théatral un pareil caractere, ait eu un génie très-rare : ce qui devroit faire changer de langage ceux qui ne savent que dire, le sublime Corneille & le tendre Racine, parce qu’ils n’ont étudié ni l’un ni l’autre. […] Je ne sais, dit la Bruyere, comment l’Opera avec une Musique si parfaite & une dépense toute Royale a pu réussir à m’ennuyer.

105. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre VII. De la Vraisemblance. » pp. 277-286

Si c’est en France, comme il y a lieu de le soupçonner ; les Gaulois étaient trop barbares lorsque les Romains les subjuguèrent, pour savoir même ce que c’était qu’un Livre, ou qu’un amas de feuilles écrites ; ils ne songeaient qu’à se déffendre des courses des Germains, qu’à ravager les pays de leur voisinage. Et pourtant l’Auteur place des Ecoles jusques dans les Hameaux, puisque le Bucheron balance s’il ne désirera point d’être Maître d’Ecole : même sous la seconde race de nos Rois, l’ignorance était générale, le Gentilhomme se fesait gloire de ne rien savoir ; les Prêtres mêmes savaient à peine écrire leurs noms : or, comment y aurait-il eû des Ecoles dans les Villages ? […] Je le répète, la Vraisemblance est d’une nécessité absolue ; sans elle les Poèmes Dramatiques ne sauraient se soutenir : le genre du Théâtre si applaudi de nos jours, l’oblige sur-tout à ne jamais marcher qu’avec elle.

106. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre XI. Du jeu des Acteurs. » pp. 345-354

Quand nous avons le bonheur de posséder une qualité qui nous est utile, on ne saurait trop la cultiver. […] Ce n’est pas seulement en portant la parole que l’Acteur doit éxprimer les passions du Personnage qu’il représente ; il faut qu’il se persuade que pendant le tems qu’il est sur la Scène, tout ce qui s’y passe ne saurait lui être indifférent : ne serai-ce que dans l’instant qu’il parle, qu’il doit paraître ému, agité ? […] On ne saurait donc trop recommander aux Comédiens en général, de jouer pendant tout le tems qu’ils sont sur la Scène, soit en parlant, soit lorsqu’ils écoutent ce qu’on leur dit : qu’ils prennent garde à ne pas rester immobiles & sans mouvemens dès qu’ils ont débité les paroles de leur role. […] En s’attachant à faire savoir à l’Acteur le moindre geste qu’il doit faire, comme par éxemple, il pose sa canne, il tousse, il crache, il faut avoir soin de piquer l’éguille en-dessus, en-dessous ; &c.

107. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre V. De la Parodie. » pp. 78-89

Le Bouffon qui contrefait les gestes, les actions de quelqu’un, fait sans le savoir la prémière Parodie que les hommes aient connus. […] Il ne saurait faire sentir la finesse d’une èxpression satyrique, & même une plaisanterie. […] Travaillez, policez avec grand soin les écrits dans lesquels vous vous moquez des fautes d’un Auteur : montrez que vous en savez plus que celui que vous reprenez. […] L’on ne sait à la fin comment appeller un pareil amas de choses si opposées les unes aux autres.

108. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « VIII. Crimes publics et cachés dans la comédie. Dispositions dangereuses et imperceptibles : la concupiscence répandue dans tous les sens.  » pp. 30-40

Mais n’est-ce rien aux spectateurs de payer leur luxe, d’entretenir leur corruption, de leur exposer leur cœur en proie, et d’aller apprendre d’elles, tout ce qu’il ne faudrait jamais savoir ? […] Qui saurait connaître ce que c’est en l’homme qu’un certain fond de joie sensuelle, et je ne sais quelle disposition inquiète et vague au plaisir des sens qui ne tend à rien et qui tend à tout, connaîtrait la source secrète des plus grands péchés. […] Mais de là, il ne s’ensuit pas que les commencements soient innocents : pour peu qu’on adhère à ces premières complaisances des sens émus, on commence à ouvrir son cœur à la créature : pour peu qu’on les flatte par d’agréables représentations, on aide le mal à éclore ; et un sage confesseur qui saurait alors faire sentir à un chrétien la première plaie de son cœur et les suites d’un péril qu’il aime, préviendrait de grands malheurs.

109. (1607) Conviction véritable du récit fabuleux « letter » pp. 3-26

Je sais de bonne part, que plusieurs ont été excités à mieux vivre, voyant en cette action quelques délinéaments de ce qui doit arriver au dernier jour. […] Tout bien cherché et recherché, je n’en ai pu apprendre aucune nouvelle, et de ton dire n’ai su tirer autre conclusion sinon que tu es un forgeron de foudre semblable au vieux cyclope des poètes. […] Que si la maladie populaireap, qui a fait le dégât qu’on sait en cette ville a emporté deux des acteurs, tu pourras savoir quand tu voudras, que l’un d’eux était déjà malade trois jours avant que monter sur ce théâtre. […] Dis que Guillaume la Chanaas et autres, qui en sont morts, et que tu sais n’avoir guère fréquenté les jésuites, pour avoir été de même religion que toi. […] Qu’en sais-tu, ignorant que es ?

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