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48. (1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE I. Abrégé de la Doctrine de l’Ecriture Sainte, des Conciles et des Pères de l’Eglise, touchant la Comédie. » pp. 2-17

Je passe aux Conciles de l’Eglise. […] On voit que ce Concile ordonne les mêmes peines que les précédents ; cependant il est certain que l’Idolâtrie ne paraissait plus sur les théâtres, dans l’intervalle du temps qui s’est passe jusques à ce Concile. […] Cet Abrégé des Conciles, des Synodes et des Rituels, doit convaincre que l’Eglise a toujours condamné et condamne encore à présent les Comédies de ce siècle, comme celles des siècles passés ; qu’elle des regarde comme de très grands désordres, puisqu’elle emploie contre les Comédiens, les peines les plus rigoureuses, savoir, l’excommunication, la privation de l’usage des Sacrements, même à la mort, et ensuite de la sépulture Ecclésiastique : en quoi elle renouvelle la plus grande sévérité des premiers siècles, puisqu’elle met les Comédiens au rang des blasphémateurs, des concubinaires et des usuriers publics. […]  » Le même Tertullien presse les Chrétiens de fuir les Théâtres, par les périls auxquels ils s’exposent, sur la fin du chap. 27 où il suppose que tout ce qui se passe à la Comédie, soit généreux, honnête, harmonieux, charmant et subtil : « Regardez tout cela , dit-il, comme un breuvage de miel dans une coupe empoisonnée, et considérez qu’il y a plus de péril à se laisser emporter à la volupté, qu’il n’y a de plaisir à s’en rassasier. […] Je ne vous déclarerai pas leur crime par mes discours ; mais par les propres paroles de celui qui doit juger toutes les actions des hommes : Celui, dit-il, qui verra une femme avec un mauvais désir, a déjà commis l’adultère dans son cœur. » Si une femme négligemment parée, qui passe par hasard dans la place publique, blesse souvent par la seule vue de son visage celui qui la regarde avec trop de curiosité ; ceux qui vont aux Spectacles non par hasard, mais de propos délibéré, et avec tant d’ardeur, qu’ils abandonnent l’Eglise par un mépris insupportable pour y aller ; ceux qui regardent ces femmes infâmes, auront-ils l’impudence de dire qu’ils ne les voient pas pour les désirer, lorsque les paroles, les voix, les chants impudiques et tendres les portent à la volupté ?

49. (1668) Idée des spectacles anciens et nouveaux « Idée des spectacles anciens et nouveavx. — Idée des spectacles novveavx. Livre II. — Chapitre XI. Du Balet. » pp. 209-318

Nous nous contenterons d’avertir que soit pour faire un beau Dessein, soit pour en bien juger, il faut regarder premierement l’Ouvrage en gros avant que de passer au détail. […] Pour peu qu’une Entrée soit forcée, elle fait un embaras dans l’imagination du Spectateur, & passe pour une extravagance du Poëte. […] Ces belles qualitez passent pour des deffauts, pour des talens estrangers, & pour des objets ridicules dans un homme de condition. […] Par-là, il est aisé de voir que le Recit n’est qu’un supplément des expressions tronquées, imparfaites, ou ambiguës de la Dance & des pas. que sa fonction est de reciter ce qui se doit passer dans l’action, s’il est fait en guise de Prologue, ou ce qui s’y passe actuellement, ou les consequences qui peuvent naistre s’il est employé dans le milieu ou sur la fin du Balet. […] Le plus beau Masque ne doit pas couster plus de trente sols, & s’il doit estre assorty de tout ; Il ne doit jamais passer quarante.

50. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre IV. De l’illusion Théâtrale. » pp. 64-79

Ceux des spectateurs qui n’ont pas les mêmes droits, mais qui ne savent pas moins ce qui se passe dans les foyers, sont dans la même disposition que les premiers ; ainsi les uns & les autres sont prévenus contre le piége qu’on tend à leur raison. […] Nous n’avons garde de dire avec l’auteur du Comédien, « que le Théâtre François se passe aisément des décorations ; que la vérité des Scènes & des discours, soutenue de la vérité du jeu des Acteurs, subjugue quelquefois tellement notre imagination, que nous ne prenons pas garde à la maniere dont la salle est décorée ». […] Une action ne se passe pas dans des espaces imaginaires. […] Loin de persuader aux Comédiens qu’ils peuvent se passer des décorations, on ne peut trop leur en démontrer l’utilité.

51. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — Lettre premiere. » pp. 2-17

Malheureusement pour lui la supposition est une supercherie d’Auteur qui a passé de mode, parce qu’elle est trop usée, & ne fait plus illusion à personne. […] Le Pasteur n’entre pas toujours dans la discussion des herbes vénimeuses qui nuiroient à son troupeau ; dès qu’il a vérifié le danger, il fait passer ses brebis en un autre pâturage. […] Ce sujet ne touche par aucun bout à la question des Spectacles ; mais en parcourant les délits qui sont atteints de la peine d’infamie, comme il a rencontré celui-ci en route, il n’a pas cru devoir le passer sous silence. […] Mais si la chose se consume par l’usage, elle passe entre les mains du débiteur qui en devient le maître2, de sorte qu’elle n’est point rendue la même individuelle, c’est une autre de même valeur qui la remplace : le gain en est donc injuste, provenant d’un fonds qui n’appartient plus au créancier, & selon la loi, la chose fructifie à son maître.

52. (1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre XIV. Que les danses sont aussi défendues les jours des Fêtes par les lois Canoniques. » pp. 76-93

Car encore bien que par le refroidissement de la charité, et de la piété Chrétienne, les fidèles commencent maintenant à donner moins de temps à ces actions saintes, et à demeurer moins assemblés dans les lieux saints ; il est néanmoins constant, que suivant l’usage des siècles passés, et suivant la discipline ancienne de l’Eglise, les jours des Fêtes étaient presque entièrement occupés par les exercices spirituels qui se faisaient dans les Eglises. […] Car quoique les assemblées des Chrétiens dans les Eglises soient des moyens qui servent excellemment à cette sanctification ; s’il arrive toutefois qu’elles aient cessé en partie en quelques lieux par le relâchement de la piété ; les fidèles ne laissent pas d’être tenus de renoncer à ces vaines et profanes récréations en ces saints jours, afin de les passer saintement. […] « Il faut s’abstenir, dit ce Souverain Pontife, les jours des Fêtes de toutes les affaires séculières, afin que l’âme Chrétienne puisse plus librement et entièrement les passer dans l’Eglise, et s’entretenir avec Dieu par des Psaumes, des Hymnes, et des Cantiques spirituels. » « Idcirco in diebus festis ab opere mundano cessandum est, ut liberius ad Ecclesias ire, Psalmis, Hymnis, et Canticis spiritualibus insistere, orationi vacare, etc. valeat Christianus. » Il est donc évident par l’autorité de ce Pape, et par plusieurs autres que nous en avons rapportées, que le fondement général de toutes les prohibitions qui regardent la solennité des Fêtes, est l’obligation de les sanctifier, qui nous est imposée dans l’Ecriture sainte, et par le commandement de Dieu même. […] NDE Comprendre: Angélus reste trop sévère envers ceux qui passent du temps à se divertir.

53. (1731) Discours sur la comédie « MANDEMENT DE MONSEIGNEUR L’EVEQUE DE NIMES, CONTRE LES SPECTACLES. » pp. 352-360

Vous ne vous souvenez que trop de vos lois et de vos coutumes passées. […] Convient-il, Mes très chers Frères, d’étaler sur des Théâtres un attirail de vanité, d’y jouer des scènes divertissantes, et d’y remplir l’esprit et le cœur des peuples de frivoles et ridicules passions, dans des conjonctures où chaque Citoyen doit prier pour son Prince ; où le Roi s’humiliant le premier lui-même sous la main toute puissante de Dieu, implore ses anciennes miséricordes, et touché d’une guerre que la justice et la Religion l’obligent de soutenir, met tout son Royaume en prière, et fait passer de son cœur Royal dans celui de tous ses sujets, son humble confiance en Dieu, et sa charité pour son peuple. […] Pendant qu’Israël et Juda, Joab et vos Princes sont sous des tentes, dans les brûlantes chaleurs de la guerre et de la saison, il vous sied bien d’écouter à votre aise un Chanteur ou une Chanteuse, et de voir sur un Théâtre comme en raccourci la figure du monde qui passe.

54. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre VIII.  » pp. 195-221

La scéne se passe chez un Chanoine, l’actrice est sa niéce, ou selon quelques uns, sa fille naturelle : elle devient Réligieuse, elle est faite Abbesse, & avec le héros fondatrice d’une Abbaye. L’acteur de son côté, dévient Prêtre ; Réligieux, Abbé, passe sa vie dans des couvens, & ne trouve par tout que de débauchés ; il en est, dit-on, le censeur, & il n’entretient pas moins un commerce de lettres, où il se détaillent, l’un à l’autre, leurs anciens désordres, avec une licence dont une danseuse de l’opéra rougiroit. […]  16, rapporte ce trait : nous avons besoin de veiller à toute heure, pour avancés que nous soyons dans la perfection, d’autant que nos passions renaissent, même quelquefois après avoir vécu long-tems en réligion, & avoir fait un grand progrès dans la vertu : comme il arriva à Silvain, Réligieux de Saint Pacôme, dans le monde il étoit comédien de profession, & s’étant converti & fait Réligieux, il passa plusieurs années dans une mortification exemplaire, sans qu’on lui vit jamais faire aucun acte de son premier métier ; vingt ans après il pensa pouvoir faire quelque badinerie, sous prétexte de récréer ses Freres, croyant que ses passions fussent tellement amorties, & qu’elles n’eussent plus le pouvoir de le faire passer au-delà d’une simple récréation ; mas le pauvre homme fut bien trompé, car la passion de la joie se réveilla tellement, que des badineries, il passa aux dissolutions, de sorte qu’on résolut de le chasser ; ce que l’on eût fait, sans un des Réligieux qui demanda grace, & se rendit sa caution, promettant qu’il se corrigeroit, ce qu’il fit, & veçut depuis très-saintement : Naturam expelles furcâ tamen usque recurret. […] Le dernier Evêque de Cahors (du Guesclin) homme de bien, qui s’étoit fait bâtir une cellule dans la Chartreuse de sa Ville Episcopale, où il alloit passer en méditation une partie de l’année, avoit donné toute se confiance à un Grand-Vicaire fort remuant, littérateur, jaloux de la gloire littéraire : qui gouvernoit à son gré ce vaste Diocèse. […] Dans le siécle passé, où le hochet des actrices n’étoit pas encore devenu un sceptre, on en eût badiné, cette imagination burlesque eût fait rire, elle eût été prise pour une scéne à ajouter aux Plaideurs de Racine, ou à la Femme juge & partie, de Montfleuri.

55. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Suite d’Anecdotes Ecclésiastiques. » pp. 106-132

Rome fut toujours pleine de pasquinades : ce nom même en est venu, & a passé en proverbe. […] C’est une satyre cruelle qu’on fait passer sous son nom : mais qui, à la bien prendre, donne de Ninon la plus mauvaise idée. […] Il est vrai qu’aucune n’a passé pour un chef-d’œuvre, & que la seule idée de pieces de collége les feroit tomber. […] Cette mort affreuse les fit passer subitement, comme Moliere, Lulli, Monsfleuri, du théatre au jugement de Dieu, du crime à l’éternité. […] Ils esperent que les influences de la piété passeront à travers les murailles, & feront d’eux & des spectateurs autant de saints.

56. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE II. Du Mariage. » pp. 30-54

Le désordre doit assurément être bien commun pour avoir fourni la matiere d’un poëme, & frappé jusqu’à un Poëte comique, qui sans crainte d’être démenti, ose dire dans toute la piece que la bonne intelligence des époux passe dans le monde pour un prodige & est un ridicule. […] C’est un roman qui ne peint pas la vérité, ne donne pas des leçons efficaces, & en donne de très-mauvaises, en faisant croire qu’on peut se passer de religion, & être vertueux sans elle au milieu des folies du monde. […] Bien du temps se passa, mais beaucoup, presque un an, Sans que rien de ma part troublât notre roman. […] Tout cela n’est ni de l’esprit ni du génie ; ce n’est qu’un grossier tabarinage que Moliere avoit cent fois entendu aux pilliers des Halles, où son père avoit sa boutique, & où il avoit passé ses premieres années, & dans les provinces, qu’il parcourut vingt ans en tabarin. […] Elles ne sont pas si matineuses : on passe à midi du lit à la toilette, de la toilette à table ; mais on se couche de bon matin, au retour du bal.

57. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE III. Suite du Mariage. » pp. 55-79

Rien : je passe condamnation ; j’ai trop mal réussi pour me pouvoir défendre (il sentoit sa blessure). […] Cette jeune fille, inconsolable de tant de malheurs, & confuse des reproches qu’on lui en faisoit, passa plusieurs jours dans la retraite, la priere & le jeûne. […] Tous répondent à cette priere pat le mot amen, ainsi soit-il, que l’Église en a emprunté, & toute la fête se passe de la maniere la plus sainte : Cum timore Dei nuptiarum convivium exercebant. […] Non : il va se passer une scène si sublime, si extraordinaire, que tous les Poëtes, Acteurs, Actrices, amateurs, amatrices, depuis Thespis jusqu’à Panard, n’en ont pas eu la moindre idée. Les deux époux passent la nuit en priere, & gardent pendant trois jours la continence, selon l’ordre de l’Ange.

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