Jugement qu’ont porté sur les spectacles les Auteurs tant profanes que sacrés, depuis Auguste jusqu’à Justinien. […] Du jugement qu’on a porté des Jeux de Théâtre, ou des divertissements qui en approchaient depuis les Scholastiques jusqu’à nos jours. 187 LETTRE.
Je les adopte avec vous ; & je voudrois que vous les eussiez suivies dans le jugement que vous avez porté de Messieurs les Ministres de Genève, & de la Religion Protestante en général. J’ai examiné ce jugement ; & j’ai vu, avec peine, qu’il semble que vous soyez le premier à transgresser les règles que vous avez établies. […] Or je vous demande, Monsieur, si, en bonne Philosophie & dans une matière aussi grave, il est permis d’asseoir un jugement sur de simples probabilités ; & si, en bon Logicien, vous pouvez traiter de Sociniens les Pasteurs de Genève, sur des écrits & des conversations où ils ne vous paroissent pas prendre beaucoup d’intérêt à la Trinité, &c. […] Avouez donc, Monsieur, que vous avez péché vous-même contre les régles de critique que vous avez établies ; avouez, que votre jugement a été trop précipité ; avouez enfin que, quand même un Théologien de Genève vous auroit donné dans ses écrits l’occasion la plus forte pour le soupçonner de Socinianisme, vous ne seriez pas plus en droit d’imputer ce sentiment à tout le corps des Pasteurs, que ne seroit ce même corps à soutenir que la doctrine des Escobars & des Busembaums est celle de l’Eglise Catholique.
Il y est parlé de quelques Ouvrages dont ont porte le jugement. […] Il faut laisser à décider ces sortes d’affaires dans le confessionnal, et ne pas les abandonner au jugement d’une infinité de personnes, qui se prévalent de tout, et qui ne sont pas assez sages pour s’arrêter à ce qu’il y a de juste et de permis dans une opinion indulgente, et pour observer toute la modération que l’Auteur demande.
Au jugement de l’un, l’orgueil est en abomination aux yeux de Dieu, l’impureté un crime si horrible qu’il ne veut pas même qu’il soit nommé, la passion pour les richesses une véritable idolatrie, le faux point d’honneur une injustice criante qui entreprend même sur les droits du Très-haut, qui s’est réservé la vengeance : au jugement de l’autre l’humilité est une bassesse, la patience une lâcheté, la mortification une folie, la pauvreté presqu’un crime, l’affliction un tourment, l’humiliation un supplice, & la modestie un vain scrupule.
Fort de la pureté de mes intentions et de la certitude que mon opinion nouvelle, en cas d’erreur, et du reproche imminent d’avoir négligé ce précepte : Sumite materiam vestris qui scribitis æquam viribus , ne peut causer aucun mal, et pourrait encore, au contraire, donner quelques indications neuves et faire naître des idées utiles à d’autres écrivains plus exercés, qui considéreraient ce sujet sous de nouveaux points de vue ; j’aurai le courage d’écrire, de soumettre à la discussion la plus solennelle, et au jugement des hommes les mieux éclairés ce que je crois avoir remarqué de plus, en continuant de chercher de bonne foi, et sans d’autre passion que celle du bonheur commun, comment il s’est fait que, malgré toutes nos lumières et nos belles institutions, malgré nos immenses bibliothèques renfermant tant de plans et de systèmes, ou de bons livres destinés à nous améliorer, comme ceux qui paraissent encore tous les jours sous toutes les formes ; et malgré les exemples, les efforts successifs et continuels des orateurs les plus éloquents et les plus vertueux, et des sages les plus instruits, les plus persuasifs, secondés par les plus vigoureuses satires et censures ou critiques vivantes de nos personnes, de nos défauts et de nos vices, nous soyons toujours tombés en effet de plus en plus dans le relâchement, et soyons arrivés sitôt au degré de cette effrayante dissolution de mœurs dont un parti accuse aujourd’hui avec si peu de discernement ces moyens mêmes de réformation. […] C’est d’après ces documents certains, dont le principal est le fait incontestable que l’irréligion et l’immoralité ont commencé à croître et s’étendre plus sensiblement chez nous, comme chez les autres, à dater de l’époque des plus fortes des leçons satiriques données en leur faveur, sous la forme dramatique ; c’est d’après ces documents, dis-je, qui, abstraction faite de tout ce qui a été dit pour et contre sur cette question, m’ont mis à portée de comparer les temps, d’apprécier moi-même les causes qui ont agi sur les mœurs aux différentes époques, par le rapprochement des effets, que j’ose avancer et entreprendre de prouver à mon tour et à ma manière, sans prétendre le faire mieux que mes prédécesseurs, mais, pour appuyer leur jugement, que l’amalgame ou le concours irrégulier de la joyeuse et attirante instruction théâtrale avec le sérieux, l’austère et premier mode d’instruction et de réformation, a été funeste à celui-ci ; qu’il l’a d’abord fait négliger et ensuite étouffé ou paralysé presque entièrement en le suppléant fort mal, en le remplaçant comme un étourdi spirituel et malin remplacerait un patriarche grave et prudent. […] Je ne m’ingère pas de remettre en jugement cette production sous le rapport dramatique ou littéraire ; cette cause a été plaidée et bien jugée ; il y a long-temps que c’est une affaire finie ; d’ailleurs, il y a prescription à cet égard : il serait trop ridicule d’y revenir et de paraître vouloir, de concert avec des étrangers jaloux de la supériorité de nos compatriotes, détruire une réputation légitimée par une si antique possession ; il ne s’agit ici que d’erreurs, ou de démontrer, d’après l’expérience, qu’une composition dramatique, quelle que soit sa perfection, présente toujours des côtés très-défectueux ; que souvent la forme, par exemple, a des effets contraires qui nuisent au fond, et empêchent l’auteur d’arriver heureusement à son but. […] Il est vrai que depuis ce temps-là on a dit le plus éloquemment, et d’après l’expérience aussi, tout ce qu’il était possible de dire des effets du théâtre sur le cœur ; mais il me semble qu’il reste encore quelque chose à dire de ses effets sur la tête ; c’est-à-dire de l’influence de ses critiques vagues des personnes sur l’esprit et le jugement.
Quand quelqu’un de vos camarades est au lit de la mort, demandez-lui s’il ne se repent pas d’y avoir été, et s’il ne craint pas d’en être repris au jugement de Dieu. […] donc ce n’est pas un divertissement innocent, car on ne se repent pas de ce qui est innocent ; donc ce confesseur qui ne vous en fait pas repentir ne fait pas son devoir, car il ne vous doit pas laisser sortir du confessionnaire qu’au même état qu’il voudrait vous présenter au jugement de Dieu.
De l’institution des enfants Essais, I, 26 [fin]a [a] Mon âme ne laissait pourtant en même temps d’avoir à part soi des remuements fermesb [c] et des jugements sûrs et ouverts autour des objets qu’elle connaissait, [a] et les digérait seule, sans aucune communicationc. […] [NDE] Erreur de jugement.
Tel est le jugement qu’en ont porté tous ceux qui ont écrit contre cette espece de divertissement. […] L’une, que le jugement est l’acte le plus parfait de notre raison, ou plutôt, que notre raison même n’est qu’un jugement continuel ; & comme c’est par la raison que nous estimons le plus notre nature, dont elle est en effet le plus précieux avantage, il y a aussi un plaisir secret attaché à l’usage que nous faisons de cette perfection de notre ame en prononçant un jugement. […] De là vient que les jugements que lon porte sur les Auteurs, & en général sur le caractere, la conduite, les discours des autres hommes plaisent plus à l’amour propre que ceux qui n’ont pour objet que les idées des choses mêmes. […] Enfin, quand nous aurions le bonheur de nous mettre entierement au-dessus de ces retours de l’amour propre, nous éprouverions toujours en nous-mêmes que l’Auteur de notre être a attaché une secrette satisfaction à l’exercice des opérations de notre ame, qui nous sont aussi nécessaires que celles du jugement, & du raisonnement, qui n’est qu’un jugement plus composé. […] Ainsi le goût qu’il trouve à juger des rapports est fondé en partie sur ce qu’il fait moins d’efforts dans cette espece de jugement.
Au dessous était l’enfer, où se voyaient quelques diables et Lucifer leur maître, accoutrés selon le dessein des jésuites : la fin du jeu était de contrefaire un jugement dernier, puis le salut des uns, et la damnation des autres. […] Entre autres, celui qui contrefaisait Dieu, et celui qui jouait le personnage de Lucifer, tellement emportés de maladie pour s’être trop échauffés, que l’on a pu y remarquer le secret et redoutable jugement du Tout Puissant sur telles abominations et attentats exécrables contre celui qui domine au ciel et en la terre. […] [NDE] L’objet de la représentation étant le Jugement dernier, qui relève du style élevé, le terme de comédie, qui définit une composition de style bas, pourrait paraître peu adapté.
Dieu fera voir au Jugement qu'on pouvait ce jour-là donner du pain à vingt personnes qui en ont manqué. […] Il en abandonne quelques-uns à leurs passions, et c'est par un juste jugement.