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255. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre VII. De l’infamie canonique des Comédiens. » pp. 153-175

Fussent-ils d’ailleurs de bonnes mœurs, ce qui n’est pas, et ne peut être, aucun Prêtre ne peut leur donner l’absolution, à moins qu’ils ne quittent absolument leur métier. La leur donnât-il, elle serait nulle, ils en sont indignes, et par l’état de péché mortel, où ils persévèrent, et par l’occasion prochaine de péché active et passive, où ils vivent, et par l’habitude de scandale qu’ils donnent. […] 3.° Les Comédiens ne se flattent pas sans doute de trouver des Evêques qui leur donnent le sacrement de confirmation ; oseraient-ils le demander ? […] l’infamie de leur métier, le désordre de leur conduite, donneraient-ils un titre d’exemption d’une loi qu’ils rendent plus nécessaire ? […] Ses parents s’assemblent pour donner un tuteur à la fille, ils défèrent la tutelle à Scaramouche son père, qui l’accepta.

256. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — SIXIEME PARTIE. — Comédies à conserver. » pp. 276-294

On voit clairement que dans sa fable il n’a envisagé que la correction des mœurs ; marchant toujours vers ce but, il ne s’est pas contenté de donner un caractère instructif à son principal Acteur, et de le punir par la perte de son bien, et par les moqueries de ses amis : il a voulu que les caractères épisodiques de sa Pièce ne continssent pas moins d’instruction que le caractère principal : c’est ce qui fait que Célimène n’est pas moins punie de sa coquetterie qu’Alceste de sa misanthropie. […] Il n’en est pas de même d’Angélique : comme sa faiblesse a été extrême, sa punition peut aussi durer toujours : elle est maîtresse à la vérité de s’éloigner des parents, des amis et des domestiques, qui lui ayant donné de bon conseils, pourraient lui en rappeller le souvenir ; mais elle est mariée à un homme très sage, qui l’a toujours conseillée comme un père : pour qui elle a une estime infinie, et avec qui elle doit passer le reste de ses jours. […] A l’occasion de cet obstacle Molière donne de grandes leçons aux Spectateurs. […] Ariste qui donne de si bonnes Leçons aux Maris trop faibles pour leurs femmes, dans la conversation qu’il a avec son frère Chrisale, n’est pas un trait bien surprenant pour les gens du métier ; mais que Molière, pour conserver le caractère de Chrisale qui molit et qui tremble devant sa femme, ait trouvé le moyen de lui faire dire à sa femme même tout ce qu’un mari ferme par raison peut et doit dire en pareil cas, et cela par l’organe d’une autre personne telle que Martine : c’est un trait de génie incomparable, et je ne me souviens pas d’en avoir vu de pareil ni avant ni après Molière. […] C’est qu’on n’y trouve pas une seule Scène de femmes ; et quoi qu’Eraste, le héros de la Pièce, soit amoureux d’Orphise, et la recherche en mariage, il ne voit pourtant sa maîtresse que pendant un instant, encore cet instant lui donne-t-il un motif de jalousie assez bien fondé en apparence.

257. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — [Introduction] » pp. -1

[Introduction] L’ACADÉMIE de Peinture, de Sculpture & d’Architecture de Toulouse, quiaspire à l’immortalité, vient de créer la charge brillante de son Historiographe, & en a donné le brevet au sieur du Rosoi, auteur de plusieurs piéces de théatre, & d’un abrégé, ou amplification, (car c’est l’un ou l’autre) des annales de Toulouse, par M. […] L’Académie de Toulouse a donné, par l’onction de cette charge, une leçon & un exemple aux théatres de la Capitale, qui n’ont point de pareille charge, quoiqu’ils en aient une infinité, dont leur almanac rapporte la liste. […] Comment le théatre qui a fourni quatre Historiographes à la Monarchie, a-t-il pu s’oublier-lui-même, & ne pas s’en donner un ? […] Elle en sera effrayée, elle y verra le déplorable monument de la folie humaine, qui a perdu, dans la chose la plus frivole & la plus dangereuse, & communément la plus criminelle, les momens prétieux d’une vie qui nous a été donnée pour acquerir une éternité de bonheur.

258. (1667) Lettre sur la Comédie de l'Imposteur « Avis » pp. -

Pour ce qui est de la relation, on a cru qu’il était à propos d’avertir ici que l’auteur n’a vu la pièce qu’il rapporte que la seule fois qu’elle a été représentée en public, et sans aucun dessein d’en rien retenir, ne prévoyant pas l’occasion qui l’a engagé à faire ce petit ouvrage : ce qu’on ne dit point pour le louer de bonne mémoire, qui est une qualité pour qui il a tout le mépris imaginable, mais bien pour aller au-devant de ceux qui ne seront pas contents de ce qui est inséré des paroles de la Comédie dans cette Relation, parce qu’ils voudraient voir la pièce entière, et qui ne seront pas assez raisonnables pour considérer la difficulté qu’il y a eu à en retenir seulement ce qu’on en donne ici. […] Ce n’est pas qu’il n’ait fait tout ce que la brièveté du temps et ses occupations de devoir lui ont permis, pour donner à son discours l’air le moins contraint, le plus libre et le plus dégagé qu’il a pu; mais, comme il n’est point de genre d’écrire plus difficile que celui-là, il avoue e bonne foi qu’il aurait encore besoin de cinq ou six mois pour mettre ce seul discours du Ridicule non pas dans l’état de perfection dont la matière est capable, mais seulement dans celui qu’il est capable de lui donner. […] C'est ce qu’on a cru devoir dire par avance, pour la satisfaction des gens sages, et pour prévenir la pensée que le titre de cet Ouvrage leur pourrait donner, qu’on manque au respect qui est dû aux Puissances : mais aussi, après avoir eu cette déférence et ce soin pour le jugement des hommes, et leur avoir rendu un témoignage si précis de sa conduite, s’ils n’en jugent pas équitablement, l’auteur a sujet de s’en consoler, puisqu’il ne fait enfin que ce qu’il croit devoir à la Justice, à la Raison et à la Vérité.

259. (1731) Discours sur la comédie « Préface de l'Editeur. » pp. -

L’ouvrage qu’on donne au Public, avait déjà paru anonyme en 1694. in-12. […] Ce fut par ordre de M. de Harlay Archevêque de Paris, qu’il traita cette matière ; voici ce qui donna occasion à ces Discours. […] C’est ce qui a produit le Traité qu’on donne aujourd’hui. […] Quoique cet ouvrage soit posthume, on ose espérer qu’on ne le trouvera pas indigne de la réputation de l’Auteur ; on n’a encore donné aucun ouvrage en notre langue, sur les Jeux de Théâtre, où il y ait tant de choses curieuses.

260. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — PREMIERE PARTIE. Quelle est l’essence de la Comédie. » pp. 11-33

Je ne le pense pas : je crois qu’on aura une idée bien plus juste de l’avare & bien plus capable de faire impression, quand on se le représentera comme un homme qui se laisse mourir de faim, & qui refuse la nourriture nécessaire à ses enfans & à ses domestiques ; comme un homme qui ne donneroit pas un écu pour racheter la vie à son voisin ; comme un homme enfin en qui l’amour de l’argent éteint toute humanité ; qui quoique très-riche refuse de marier & de donner des états à ses enfans ; qui fait tort à la société en accumulant des richesses qui devroient circuler. Je laisse au lecteur à penser lequel de ces deux portraits de l’avare, lui donne le plus d’horreur pour l’avarice : s’il hésite à prononcer, je vais ajouter une réflexion qui le décidera peut-être. […] Après la distinction que je viens de faire, je puis établir pour maxime générale, que la bonne Comédie exclut le ridicule qui tombe sur l’extérieur ou sur la maniere d’être du vice : la raison que je vais tâcher de donner de cette regle, servira de réponse à l’objection qu’on m’a faite ci-dessus. […] Ce sont ceux qui ne sont ni assez affligeans pour exciter la compassion, ni assez révoltans pour donner de la haine, ni assez dangereux pour inspirer de l’effroi ; c’est-à-dire, que M. […] A l’égard des vices dont les suites peuvent être funestes à la Société, la Comédie doit se donner bien de garde d’y toucher, parce qu’elle les rendroit odieux, & qu’elle pourroit persuader aux hommes de les abandonner.

261. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — SECONDE PARTIE. Si les Comédies Françoises ont atteint le vrai but que se propose la Comédie. » pp. 34-56

Il s’agit donc pour donner la solution de cette seconde question de se rappeller le principe établi au commencement de ce discours. […] Voyons maintenant si nos Auteurs se sont attachés plutôt à peindre la maniere d’être extérieure du vice, que le fond du vice ; ou, ce qui revient au même, s’ils se sont appliqués à rendre le vice ridicule, plutôt qu’à en donner de l’horreur : de cet examen naîtra la décision de cette seconde question. […] Cette intrigue avec les débats du cuisinier & de Valere forment le nœud de la piece, & donne matiere à différentes sortes de plaisanteries qui sont long-temps oublier qu’il s’agit d’un avare. […] Il tâche de séduire la femme de son bienfaiteur ; il obtient d’Orgon la promesse d’épouser Marianne sa fille ; il persuade à Orgon de lui donner tout son bien ; & quand il est parvenu à le dépouiller de tout ce qu’il avoit, il l’oblige de sortir de sa propre maison. […] J’avois dessein d’examiner encore quelques autres Auteurs comiques ; mais je pense que l’examen du Tartuffe a donné à mon opinion toute la certitude dont elle est susceptible.

262. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VI. Ericie, ou les Vestales. » pp. 138-159

quel amusement peuvent donner le silence, la retraite, la modestie, la pauvreté, les mortifications d’un bon Religieux ? […] Cette opposition de sa conduite à son état excite plus d’indignation qu’elle ne donne de ridicule. […] quelle folie de vouloir leur y donner des leçons ! […] Apparemment le poignard est resté dans la blessure, il va le lui arracher pour s’en percer lui-même, au lieu de lui donner du secours. […] Quelle idée cependant donne-t-on du mariage, pour en dégoûter ?

263. (1709) Mandement de M. L’Evêque de Nîmes contre les Spectacles pp. 3-8

L’argent, qui vous coûte tant à donner à nos hôpitaux, vous le donnezb là avec complaisance.  […] Vous leur donniez vos approbations, et par vos applaudissements et vos flatteries, vous échauffiez ces serpents à mesure qu’ils vous piquaient : vous faisiez part de ces recréations empoisonnées aux personnes que vous aimiezc, et ce qui est plus déplorable, vous donniez à vos enfants encore innocents, la vue de ces vanités, pour récompense de leur sagesse. […] Donné à Nîmes, dans notre Palais Episcopal, le huitième jour de Septembre mil sept cents huit. […] [NDE] La version de 1712 corrige en « donniez ».

264. (1731) Discours sur la comédie « Lettre Française et Latine du Révérend Père François Caffaro, Théatin ; à Monseigneur L’Archevêque de Paris. Imprimée à Paris en 1694. in-quarto. » pp. -

et voir en même temps le scandale qu’a donné cet ouvrage, sans en être sensiblement affligé ; et j’ai cru même qu’il était de mon devoir pour l’édification de l’Eglise, et pour l’honneur de mon ministère de déclarer publiquement que cette Lettre n’est point de moi, et que je n’y ai aucune part, que je n’en ai rien su qu’après qu’elle a paru, et que je la désavoue absolument. […] C’est, Monseigneur, ce qui me fait prendre la liberté d’écrire à VOTRE GRANDEUR vous reconnassant pour mon Juge né et d’institution divine en matière de Doctrine, comme vous l’êtes aussi de tout le Troupeau qui vous est confié, dont je me fais honneur d’être, et auquel le saint Esprit vous a donné pour Pasteur, établi par Jésus-Christ même, et me tenant par cette raison obligé de faire cette déclaration de mes sentiments entre vos mains, pour la rendre publique sous votre autorité, si vous le jugez convenable. […] Je fis il y a dix ou douze ans un écrit Latin sur la Comédie, où sans avoir mûrement examiné la matière, et par une légèreté de Jeunesse, je prenais le parti de la justifier, de la manière que je me figurais qu’elle se représentait à Paris, n’en ayant jamais vu aucune, et m’en faisant, sur les rapports que j’en avais ouï, une idée trop favorable, et je ne puis que je ne reconnaisse à ma confusion, que les principes et les preuves qui se trouvent dans la Lettre qui s’est donnée au public sans ma participation, sont les mêmes que dans mon écrit particulier, quoi qu’il y ait quelques endroits de différents entre les deux, où l’Auteur de la Lettre dit ce que je ne dis pas, et parle autrement que je ne fais moi-même dans mon écrit, comme en ce qu’il apporte sans raison en faveur de la Comédie, votre silence sur sa représentation, Monseigneur, pour en inférer un consentement et une approbation tacite de votre part, ce que je n’ai point fait dans mon écrit, où je ne dis rien du tout qui puisse regarder personnellement V. […] Je ne puis disconvenir qu’à comparer la Lettre avec mon écrit, il ne soit visible qu’elle en est tirée presque de mot à mot, et que par là ce que j’ai fait avec précipitation a donné malheureusement et contre mon dessein, ouverture à cette Lettre; Je n’ai jamais fait état d’imprimer mon écrit : il n’était pas composé avec assez d’exactitude pour prétendre le rendre public ; je ne m’étais pas assez instruit du sujet que j’y traitais, ni des autorités que j’apportais ou pour ou contre, entre autres de celle de S. […] Je suis très convaincu après avoir examiné la chose à fond, que les raisons qu’on apporte d’un côté pour excuser la Comédie sont toutes frivoles, et que celles qu’a l’Eglise au contraire sont très solides et incontestables, quand elle met les Comédiens au nombre de ceux à qui elle refuse dans la maladie le Viatique, à moins qu’ils ne réparent le scandale qu’ils ont donné au public, en renonçant à leur profession, et qu’elle ne les veut pas admettre à recevoir des Ordres, s’ils s’y présentaient.

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