Autre paradoxe : il veut, malgré toutes les regles, qu’on prenne dans la Tragédie les leçons & les exemples des princes, & dans la Comédie ceux des particuliers, pour inspirer l’horreur & le mépris du vice, à l’exception du libertinage, qu’on n’évite que par la fuite, & pour lequel le Spectacle est le plus grand danger.
Il est même convenu que dans le doute si la piece est licencieuse, si on est foible, si on succombera au danger, on doit s’en abstenir.
Saint Augustin a connu le danger qu’on courait à des représentations trop voluptueuses des passions qu’inspirent l’amour ; « J’avais, dit ce grand homme(3), un penchant éxcessif pour les Spectacles du Théâtre ; ils me peignaient au naturel mes faiblesses, me les fesaient aimer ; vantant la douceur des flammes amoureuses, ils entretenaient le feu qui me dévorait ».
Vous voyez bien, Monsieur, que votre héroïsme est absurde, et surtout dans le cas présent ; ne pouviez-vous pas satisfaire à l’engagement que vous vous étiez imposé vous-même d’éclairer le Public sur les dangers du spectacle, sans trahir les devoirs de la reconnaissance et de la société ?
Lazare, et autres circonvoisines, contenant que depuis quelque temps Jacques Avenet, locataire du jeu de paume de la Fontaine, aurait introduit des Comédiens en icelui, encore que ledit lieu soit des plus incommodes de la ville, pour être la rue fort étroite et la plus passagère des carrosses, étant ladite rue Michel-le-Comte composée de maisons à portes cochères, appartenantes et habitées par plusieurs personnes de qualité, et Officiers des Cours souveraines, qui doivent le service de leurs charges, lesquels souffrent de grandes incommodités tous les jours, à cause que lesdits Comédiens exercent et jouent leurs comédies et farces, même en ce saint temps de carême, et par le moyen des embarras, des carrosses et chevaux qui se rencontrent dans ladite rue à toutes les avenues, tels que les gens de pied n’y peuvent trouver passage, et sont tous les suppliants, leurs familles et domestiques, empêchés de sortir, non pas même d’une maison à l’autre, contraints le plus souvent d’attendre la nuit bien tard pour rentrer dans leurs maisons, au grand danger de leurs personnes par l’insolence des laquais et filous, coutumiers à chercher tels prétextes et occasions pour exercer plus impunément leurs voleries, qui sont à présent fort fréquentes dans ladite rue, et plusieurs personnes battues et excédées, avec perte de leurs manteaux et chapeaux ; étant les suppliants tous les jour de comédie en péril de voir voler et piller leurs maisons, dont s’étant plaints plusieurs fois audit Avenet et fait dire aux Comédiens de se retirer et pourvoir en lieu moins incommode et passant, ils se seraient vantés d’avoir permission du Lieutenant civil, et en avoir passé bail pour ledit temps.
Il n’y a que celles-ci contre les Comédiens ; on n’en a jamais dénoncé aucun, et partout on peut communiquer avec eux, quoique par tout l’infamie de leur métier et le danger de leur commerce les fassent éviter par les honnêtes gens qui ont de la religion et des mœurs, comme une très mauvaise compagnie.
D'ailleurs de si violents efforts, de si violentes agitations sont bien fatigantes ; c'est acheter le plaisir bien chèrement, c'est réunir le danger, la faute et la peine.
Excès du temps que l'on y perd, de la dépense qu'on y fait, du danger que l'on y court, du plaisir que l'on y goûte, de l'ivresse à laquelle on se livre, de la liberté dont on y jouit, des passions qu'on y exprime et qu'on y sent, tout y est réuni, tout invite, l'un appuie l'autre, l'un embellit l'autre.
On a de M. l’Abbé Jacquin sur la même matiere un écrit très-solide26, où en trois entretiens l’Auteur fait connoître l’origine des Romans, leur inutilité, & leur danger pour l’esprit & pour le cœur. […] *** Souvent un jeune cœur, qu’épouvantoit l’obstacle, Ou le danger même d’aimer, Perd cette heureuse crainte, & de tout le Spectacle N’apprend qu’à ne plus s’alarmer.
En suivant cette méthode, on mettra toutes sortes d’intrigues, tous les genres de vices & de ridicules sur le Théâtre, non-seulement sans danger, mais avec fruit. […] C’est sous ce Titre, que je me propose de remédier aux inconvéniens du Théâtre, d’en prévenir les dangers & d’en réformer tous les abus. […] Quelquefois l’admiration, plus souvent des mouvemens impétueux ; rarement cet attendrissement honnête qui agite l’âme sans danger.