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20. (1687) Instruction chrétienne pour l’éducation des filles « CHAPITRE XIII. Des jeux, des spectacles, et des bals, qui sont défendus aux Filles Chrétiennes. » pp. 274-320

il n’y a point de mal, on y apprend à vivre dans le monde ; mais prenez garde qu’il n’y a rien d’innocent dans ces divertissements qui sont souvent des occasions prochaines de péché à ceux qui s’y trouvent, sans avoir mauvaise intention, parce que les comédiens d’aujourd’hui sont semblables à ceux dont parle Sénèque, qui corrompaient de son temps les mœurs, sous le beau prétexte de les reformer, et qui sous couleur de reprendre le vice, l’insinuaient adroitement et avec artifice dans les esprits des spectateurs, et qui voulant corriger les hommes en les divertissant, les perdent en les faisant rire, et meurent par cette fausse joie, comme ceux qui ont mangé de l’herbe Sardoniquec, selon la remarque des Naturalistes. […] Cependant il n’en demeure pas là, il travaille, il prie, il fuit les occasions, et dans ses retraites il fait de très austères pénitences, il afflige son corps par les jeûnes et par les veilles, il lève la main sur lui, et le châtiant jusqu’a l’effusion du sang, il le réduit à vivre selon les lois de l’esprit, de peur, dit-il, qu’en l’épargnant, je ne me trouve dans le nombre des Réprouvés. […] Cependant l’erreur où vivent la plupart des personnes du monde sur ce point, me paraît si pernicieuse à l’Eglise et au salut des particuliers, qu’on ne doit rien oublier pour les désabuser. […] Mais, répondrez-vous, toujours vivre sans plaisir, ce n’est pas vivre, j’aimerais autant mourir, car la vie Chrétienne n’est qu’une mort continuelle. […] Vous n’ignorez pas que l’homme ne naît que pour mourir, que le premier pas qu’il fait dans la vie, est la première démarche qui le conduit au tombeau ; il est coupable et condamné à la mort dès qu’il commence de vivre ; la sentence est déjà prononcée, mais l’exécution en est différée autant qu’il plaît au souverain Juge, sans que le criminel en ait la connaissance : voilà votre condition et la mienne, c’est pourquoi, si nous sommes sages, nous ne devons pas nous assurer d’un seul moment.

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