Qui nous consolera du malheur d’être dans ces jours malheureux, où un délire cynique met tout en œuvre, Tragique, Comique, Dramatique, art déclamatoire & Pantomime, pour porter le fer & le feu dans nos Villes & nos campagnes ? […] Cette hydre à cent têtes occupe cent de nos villes, & son haleine empestée pullulant à chaque souffle, fait que la France notre mere n’est qu’une playe depuis la tête jusqu’aux pieds . […] ) mêlent ordinairement à leurs jeux des farces & comédies dérisoires, qui sont choses défendues par les Saints Canons, dont les assemblées donnent lieu à des parties ou assignations d’adultère & de fornication, & qui font dépenser de l’argent mal-à-propos aux Bourgeois & aux Artisans de la Ville . […] en vain : nos Villes trop semblables à Bethsaïde & à Corrozaïn, mériteront leurs anathêmes, & ce sera pour notre plus grande condamnation que la vérité (p. 21.) […] Et vous, Bourgeois, vous perdrez l’habitude de regarder avec mépris des hommes doublement respectables… Contenus d’abord par des Réglemens sages, protégés ensuite & même considérés dès qu’ils en seront dignes, enfin absolument placés sur la même ligne que les autres Citoyens , nos Villes auront bientôt l’avantage de posséder ce qu’on croit si rare, & qu’il ne l’est que par notre faute : une troupe de Comédiens estimables… Que sçai-je si ne craignant plus de vous deshonorer parmi nous, en vous livrant au théâtre , il ne vous prendra pas à tous envie d’y monter, d’y endosser un habit à la Romaine, (Encyclopédie, au mot Genève,) & d’y cultiver non seulement sans honte, mais même avec estime, le talent si agréable & si peu commun de nous divertir ?