/ 398
26. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien second. De la vanité des Bals & Comedies en general tiré des Sermons du R. Pere Claude la Colombiere de la Compagnie de Jesus. » pp. 17-25

Si quelcun de ces solitaires, qui se sont volontairement condannez à passer leur vie en jeûnes & en priéres, venoit aujourd’hui se montrer dans vos assemblées, s’inviter lui même à vos plus-celebres repas, vouloir être de toutes vos parties, & ce qu’on ne peût même penser sans fremir, marcher en masque par les ruës de vôtre Ville ? […] Quel monstre dans une ville Chrêtienne ! […] Quoi, mes Dames, mettre cinq ou six heures de tems a se parer & à se peindre le visage, pour aller ensuite dans une assemblée tendre des pieges à la chasteté des hommes, & servir de flambeau au demon, pour allumer par tout le feu de l’impudicité, demeurer les nuits entieres exposées au yeux & à la cajollerie des jeunes fous, & de tout ce qu’il y a de libertins dans une ville, emploïer tout ce que l’art & la nature ont de plus dangereux pour attirer leurs regars, & pour leur renverser l’esprit, deguiser vos personnes & vôtre sexe, pour n’avoir plus honte de rien, & pour ôter à la grace ce petit secours, qu’elle trouve dans la pudeur, qui vous est si naturelle. Rouler de quartier en quartier sous un habit de teatre, & avec une impudence de Comediennes, pour être vûës de tous les yeux, & pour voir dans un jour tous les visages d’une ville. […] Quoi si cette fille n’est vaine & ne voit ce monde, elle ne sauroit rencontrer ce, que Dieu lui a destiné avant tous les siecles, & les decrets éternels de sa Providence ne seront jamais accomplis en elle, si elle ne paroit à tout les bals & à toutes les fétes d’une Ville : Prenez garde au contraire que le dessein, qu’il avoit de vous sauver avec elle, ne soit traversé par une conduite si peu Chrétienne.

/ 398