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237. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [A] » pp. 297-379

Ainsi les peintures de l’amour sont peu dangereuses pour les mœurs ; elles usent ce sentiment ; c’est de la paille dans le feu, qui s’allume, jette un éclat vif, & s’éteint : mais, l’effet des Pièces où l’amour fait le principal rôle, fût-il certain sur toutes sortes de personnes ; dans tous les âges, cette passion a l’avantage de pouvoir être tournée vers un but honnête ; elle est, tout considéré, la moins dangereuse de toutes pour les bons naturels : en peut-on dire autant de la vengeance, de l’ambition, que le Réformateur n’exclut pas du Théâtre ? […] Je vois, par cet Article, que vous cherchez à rendre les émotions plus durables & plus vives : auriez-vous oublié, mon amie, que c’est-là précisément le moyen d’exciter dans le Spectateur le dérèglement, ou si vous voulez, le trouble des passions, & de le mettre à l’unisson, avec les personnages du Drame ? […] Les Danses du Père-de-famille avaient été simples, comme sa Musique : celles des Prêtres, que le loisir rendait propres à perfectionner les arts agréables, devinrent compliquées, vives ; elles parurent des merveilles. […] Tel fut donc vraisemblablement le nom des Odes de Thespis, qui n’avaient rien de plus Dramatique que notre Satyre Ménippée, ou celles de Régnier & de Despréaux, si ce n’est le débit qu’on en fesait de vive voix, & peut-être une sorte de Dialogue où le même homme interrogeait & repondait. […] Mais, il faut le dire à notre honneur, il y a une grande différence dans la manière dont ce goût se manifeste : chez nous, c’est une simple affluence, un vif empressement ; on reconnaît un Peuple poli, léger, qui court se réjouir.

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