La Suivante s’en va, et les Beaux-frères restant seuls, le sage prend occasion sur ce qui vient de se passer de pousser l’autre sur le chapitre de son Panulphe. […] Dorine l’aborde là-dessus ; mais à peine la voit-il, qu’il tire son mouchoir de sa poche, et le lui présente, sans la regarder, pour mettre sur son sein qu’elle a découvert, en lui disant que « les âmes pudiques par cette vue sont blessées, et que cela fait venir de coupables pensées ». […] Or ce plaisir, quand il vient des choses raisonnables, n’est autre que cette complaisance délicieuse, qui est excitée dans notre esprit par la connaissance de la Vérité et de la Vertu : et quand il vient de la vue de l’ignorance et de l’erreur, c’est-à-dire de ce qui manque de Raison, c’est proprement le sentiment par lequel nous jugeons quelque chose ridicule. […] Or non seulement la galanterie de Panulphe ne convient pas à sa mortification apparente et ne fait pas l’effet qu’il prétend ; ce qui le rend ridicule, comme vous venez de voir : mais cette galanterie est extrême aussi bien que cette mortification, et fait le plus méchant effet qu’elle pouvait faire, ce qui le rend extrêmement ridicule, comme il était nécessaire pour en tirer le fruit que je prétends. […] Voilà, Monsieur, ce que vous avez souhaité de moi : gardez-vous bien de croire pour tout ce que je viens de dire, que je m’intéresse en aucune manière dans l’histoire que je vous ai contée, et de prendre pour l’effet de quelque opinion préméditée, l’effort que j’ai fait pour vous plaire : je parle sur les suppositions que je forge, et seulement pour me donner matière de vous entretenir plus longtemps, comme je sais que vous le voulez.