Cette œuvre profane & de l’invention de Satan, peut-elle trouver sa place parmi les œuvres pures des Chrétiens ? […] loin de s’en faire des crimes, on s’en fait honneur : on est presque embarrassé dequoi l’on s’accusera au Tribunal sacré de la Pénitence, quoi qu’on soit chargé de mille crimes de la sorte ; & après une vie toute mondaine, toute voluptueuse, toute sensuelle, passée dans les jeux, dans les spectacles, on ne trouve presque rien à dire au Prêtre ! […] Or ceux qui vivent de la maniere que je viens de dépeindre, ne composent pas sans doute le plus grand nombre : on n’en trouve que très-peu dans le monde, & vous en convenés vous-même ; il est donc certain, que tandis que vous suivrés le grand nombre, cette multitude de mondains, vous ne serés pas du nombre de ceux qui se sauvent. […] croiés-vous que s’il faisoit maintenant la discussion des œuvres du grand nombre qui est dans cette Eglise, il trouvât seulement dix Justes parmi nous ? […] Souffrés, mes Freres, que je finisse mon Discours par ces paroles : au sortir de ce Temple vous allés rentrer dans le monde figuré par l’infidelle Babilone : vous y allés voir ces Dieux d’or & d’argent, postés dans les places publiques, devant qui presque tout le monde est prêt de fléchir le genoüil : vous y allés trouver les Idoles vivantes de luxe & de vanité, ces hommes & ces femmes revêtus d’habits riches & pretieux qui brillent par la pompe de leur train, & la magnificence de leur équipage, devant qui tout le monde rampe & se prosterne : vous y allés trouver ces marques d’orgueil dont tous les riches & les grands se parent ; pour inspirer du respect & de la crainte aux petits : ces plaisirs que tout le monde se permet, ces richesses que tout le monde adore, ces voluptés aprés lesquelles tout le monde soupire, ces honneurs & ces dignités que tout le monde brigue, ces usages que tout le monde embrasse ; prenés bien garde de vous laisser entraîner à ces exemples de mondains : ne vous laissés par aller au torrent de la multitude ; & si vous voulés être du petit nombre de ces Israëlites fidelles, dites comme eux dans vôtre cœur : oüi, mon Dieu, il n’y a que vous qu’il faille adorer, te oportet adorari Domine .