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181. (1700) IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, etc. [Sermons sur tous les sujets de la morale chrétienne. Cinquiéme partie] « IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, &c. » pp. 95-126

L’on demande une réponse precise ; mais comme j’ay apporté toute la precaution que j’ay jugée necessaire pour ne pas exaggerer le desordre qui s’y trouve, je n’en apporteray pas moins à vous répondre sur ce chapitre ; car je dis qu’il n’en est pas de ces sortes de choses, comme des actions qui sont expressément contre la Loy de Dieu, où il est facile de prononcer définitivement ; mais pour celles qui ne sont défenduës qu’à de certaines personnes, & dans de certaines occasions, cela dépend des suites, & des circonstances, où elles sont plus ou moins criminelles, ou dangereuses. […] Je pretends donc satisfaire suffisamment à vôtre demande, en vous répondant que c’est peché, & même peché mortel à l’égard de plusieurs ; & puisque c’est des circonstances que dépend la décision que vous me pressez de vous donner, sur une chose qui vous tient au cœur ; je vous donne trois ou quatre regles, par lesquelles vous conclurez vous-mêmes, à quels spectacles il vous est défendu de vous trouver, & quelles sont les personnes qui ne peuvent s’y trouver, sans commettre un grand peché. […] Car pourquoy, dira-t-on, se feroit-on un point de conscience d’assister à ces spectacles, puisque les gens d’une vertu plus reguliere, & d’une probité plus reconnuë, ne font point de scrupule de s’y trouver ? […] Je fonde, Messieurs, ce danger sur ce que ces spectacles nous mettant devant les yeux tout ce que le monde a de plus contagieux, il est toûjours à craindre que ceux qui y trouvent tant de plaisir, ne se conforment enfin à cet esprit du siecle & du monde, que Saint Paul juge si pernicieux aux Chrétiens, qui y ont si solemnellement renoncé : ad Rom. […] Ne me dites point, que vôtre âge, vôtre profession & vôtre état vous mettent à couvert de ce danger ; car cela même est le plus dangereux écueïl où vous puissiez donner, de croire, contre le sentiment de tous les Saints, & contre l’experience de tous les hommes ; que vous n’avez rien à craindre des surprises d’une passion, que les Solitaires mêmes, aprés avoir blanchi dans les austeritez de la penitence, ont crû si redoutable, & qui n’ont pû trouver d’autre moyen de s’en défendre, que la fuite des occasions, & des objets capables de l’exciter.

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