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49. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VI. Suite d’Anecdotes illustres. » pp. 184-225

L E Journal politique mars 1774, & les autres Journaux rapportent qu’à Varsovie on prépare une belle salle de spectacle, que le Baron de Karti, noble Polonois s’est chargé de la direction de cette entreprise, comme les nobles Actionnaires le font à Toulouse, à Bordeaux, &c. qu’il a engagé une troupe de Comédiens, de Chanteurs, de Danseurs à jouer sur son théatre, dont l’ouverture se fera d’abord après Pâques pour célébrer la fête & donner l’alleluya à la République. […] Il ne faut pas d’autres spectacles, celui qu’on y donne est un spectacle national, les Acteurs en sont excellens ; il y a du comique & du tragique, on reconnoît sans peine parmi eux les Arlequins, les Scaramouches, les Pantalons, &c de la grande troupe & les valent bien : sous ces noms ils désignent parfaitement & caractérisent clairement tous les Seigneurs qui composent cette assemblée ; les Ministres des Puissances co-partageantes la grande affaire de la division du Royaume, les Peuples qui en sont la victime ; rien de plus piquant pour les Polonois, il l’est moins pour nous qui ne connoissons pas les personnages ; mais rien de plus vrai & de plus juste, le Roi de Prusse y joue un grand rôle. […] La troupe des Comédiennes est l’élite des courtisanes, & la troupe de leurs amans est l’élite des personnes distinguées ; celles qui ne sont pas encore enrôlées dans les troupes de Thalie, n’en sont pas moins initiées dans les mistères & habiles à jouer leur rôle, & dans le fonds toute coquette n’est-elle pas une vraie Actrice ? […] On s’arrêta à ce projet plus commode & moins coûteux, de le mettre au carrefour de Bussi ; la troupe fut inconsolable de n’avoir pas l’honneur d’être logée dans la maison d’un Prince du sang, & quel Prince ? […] Henri, père du grand Condé dont Lenet fait le plus pompeux éloge, étoit le pendant de Brezé, livré à tous les plaisirs dans sa retraite de Bourges ; il y entretenoit deux excellentes troupes de Comédiens François & Italiens ; le jeu, la bonne chère, les bals, les ballets, &c lui faisoient couler les jours les plus agréables.

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