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95. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre I. Des Parfums. » pp. 7-32

Les Romains qui portoient le luxe à l’excès pour embaumer leur théatre, y faisoient couler pendant le spectacle des fontaines d’eaux de senteur, & en faisoient tomber une pluie sur les spectateurs. […] Cette source intarissable en fait un très-grand commerce ; tous les serrails comme ici nos théatres occupent une foule de parfumeurs ; aussi le luxe, la molesse, la pluralité des femmes, la liberté du divorce y exercent leur empire sans résistance, & les peuples efféminés toujours vaincus quand ils ont été attaqués par les Européens, ont été moissonnés comme les fleurs qui sont dans les prairies tombent sous le tranchant de la faulx. […] Tel ce guerrier petit maître qui étant tombé dans la poussière, y perdit le chef-d’œuvre de sa toilette, fœdare in pulvere crines vibratos calido ferro, myrthaque madentes . […] Mais on a beau faire, l’homme est destiné à souffrir & à mourir pour punir ses péchés, tous ses efforts ne retarderont pas d’un instant le coup de la mort, & n’empêcheront pas que l’odeur qui s’exhale de leur cadavre, n’oblige à les enfoncer bien avant dans la terre, pour n’en être pas infecté ; & c’est souvent au moment de leur dernier soupir, que comme Antiochus, leur corps tombe en pourriture, écarte leurs plus chers amis qui ne peuvent en approcher.

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