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53. (1769) Dissertation sur les Spectacles, Suivie de Déjanire, Opéra en trois actes, par M. Rabelleau pp. -71

Dans l’Œdipe de Sophocle, la scène représente une place publique, un palais, un autel, des enfans & des vieillards prosternés, & plus loin, on apperçoit un peuple qui paroît environner les deux temples de Pallas & l’autel d’Apollon. […] A gauche c’est le célèbre temple de Junon ; la ville où vous arrivez, c’est Mycène ; & ce palais, témoin de tant de sanglantes aventures, est le palais des descendans de Pélops ». […] Ces représentations brillantes étoient données au peuple, & elles formoient le sujet ou l’occasion d’une fête & d’une réjouissance publique ; & lorsque l’argent manquoit quelquefois, on prenoit celui déposé dans le temple de Delphes, & destiné aux dépenses de la guerre. […] La Bruiere a dit que dans quelques siecles, lorsque la postérité entendra parler d’une ville dans laquelle il n’y avoit ni jeux, ni cirques, ni places publiques ; où les hommes couroient dans les rues comme en s’évitant, & alloient en tems de paix dans les temples & dans les cercles de femmes avec une arme offensive à leur côté, on croira que nous avons toujours été barbares. […] Une preuve incontestable de cette vérité, est le dernier opéra nouveau, l’opéra d’Ernelinde, où l’on voit une prison vaste & superbe succéder à une forteresse, dont les murailles ne sont guères plus hautes que les hommes, & un temple tout resplendissant de l’éclat des métaux les plus précieux, pour lequel on tremble beaucoup plus que pour les soldats qui viennent s’égorger jusqu’aux pieds des autels, dans cet asile sacré, & cela dans un tems où les Rois de la Norvege sont encore portés sur des faisceaux d’armes, comme au premier acte, & dans lequel il n’est fait aucune mention de l’allégorie & de l’illusion de la fable.

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