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82. (1836) De l’influence de la scène « De l’influence de la scène sur les mœurs en France » pp. 3-21

Euripide, Magnès, Cratès, Phérécrate suivirent la ligne tracée par la législation : Cratinus, Eupolis, Aristophane s’en écartèrent les premiers, en introduisant la satire personnelle sur la scène ; soit que, d’abord timide, elle ne blessât que d’obscurs citoyens ou les ennemis des chefs de l’Etat, les magistrats ne la réprimèrent point, et ne le firent que lorsque, abusant de leur tolérance ou fière de leur complicité, elle souleva l’indignation publique par ses excès. […] Pas un trait poétique, pas une seule étincelle de génie ne jaillit de ces grossières profanations des mystères de la Foi ; les moralités, les farces, et toutes les plates compositions qui suivirent, présentent la même stérilité de pensée, de sentiment et de poésie. […] Voltaire, qu’autorisait l’exemple d’Euripide, ne le suivit pas en tout ; plus délicat dans le choix de ses sujets, il rejeta en général ces grands coupables qui ne peuvent rapprocher de la vertu que par l’horreur qu’ils inspirent, mais qui peuvent aussi faire avancer dans le crime. « Il y a du bon dans cette pièce , disait un avare assistant à l’une des représentations de Molière, elle offre d’utiles leçons d’économie. » La répugnance de Voltaire à donner au public cette dangereuse instruction, mérite notre reconnaissance ; son respect pour les mœurs, nos éloges et notre admiration ; car, il faut le dire, le vice alors infectait la nation, et siégeait impudent au conseil de son roi. […]  » Nos auteurs en s’écartant d’une route suivie par nos grands maîtres, s’éloignent aussi de l’objet du drame, qui ne doit être qu’une école de civilisation.

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