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45. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre III. Jurisprudence du Royaume. » pp. 51-74

On peut croire après cela que ce grave Magistrat était bien éloigné de les fréquenter et d’y souffrir les arbitres de la justice : « Scenica arti spectacula ut irritamenta vitiorum, et ad corrumpendos animos potentissime valentia, caute et studiose vitanda. » (pag. 364.) […] Ce n’est que peu à peu, à mesure que l’esprit de frivolité et le goût du vice ont pris le dessus, qu’on a souffert, après bien des oppositions des voisins, et des gens de bien, que la folie et le scandale eussent des établissements fixes et des maisons publiques, où tout le monde fût reçu et invité à en aller prendre des leçons et voir des exemples. […] Pierre, qui a le double pouvoir de les abolir, et la double raison de la discipline et de la police, les souffre et les fait protéger, sans les approuver, puisque dans le même temps qu’il les laisse représenter, il maintient les canons qui les condamnent, les Prédicateurs et les Confesseurs qui les proscrivent, que Benoît XIV dans ses ouvrages les a très authentiquement et très savamment censurés. […] On ne les écoute pas en corps dans leurs procès, ils n’en font pas un aux yeux des Juges ; on ne leur doit aucune audience, et ce n’est que par grâce qu’on souffre qu’ils prennent dans leurs écritures la qualité de Comédiens, que les Tribunaux ne connaissent pas. […] Cet usage s’y est si bien établi, qu’il y est devenu une loi : une Actrice modeste ne serait pas soufferte dans la troupe, et n’oserait paraître sur la scène.

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