Visages balafrés, pantheres mouchetées, Tant l’Hiver que l’Eté toujours bien évantée ; Eclatantes chetives, attendez votre sort, Car vos charmes jamais ne charmeront la mort. […] Sachez donc & croyez, insensés fanfarons, Qu’elle vous chaussera bientôt ses éperons ; Elle fera l’appas, mais d’une telle sorte, Qu’il vous faudra sortir par une fausse porte. […] C’est un art chez les femmes de faire, de choisir & de placer les mouches ; on en fait de toutes sortes de figures, rondes, ovales, triangulaires, en croissan, en fleche, de toute grandeur ; invisibles, petites, médiocres, grandes : on en fait de plusieurs couleurs, selon la nature du teint ; la plupart sont noires, on les place de mille manieres : solitaire, simétrisée, en couronne, en ligne, en grand nombre, en petit nombre, selon le goût ou les desseins qu’on se propose, & les conquêtes qu’on médite ; on en met sur toutes les parties du visage, jusques sur le bout du nez : ces emplacements sont de la derniere importance, pour favoriser & faire mieux sortir les traits de la phisionomie, la fraîcheur & le coloris du teint ; chacune selon sa figure, sa grandeur, sa situation produit un effet bien différent, qu’on étudie avec le plus grand soin ; elles donnent un air galant, modeste, sérieux, enjoué, triste, majestueux, effronté, ce qui leur a fait donner des noms différents, qui formeroient un Dictionnaire de Toilette. […] Il faut telle couleur à la Blonde, telle à la Brune, telle à la Pale, telle à la Rouge, &c. on croit d’abord que le hazard, la mode & le caprice placent les rubans, tout cela sans doute y entre pour beaucoup ; mais l’essentiel & la fin de l’art, c’est le choix & la position des couleurs savamment appropriées à celle du visage, pour l’animer ou la tempérer, & la faire sortir avec avantage.