pourquoi enfin ne peut-on l’exercer sans s’exclure soi-même de la société des Fidèles, sans se rendre indigne de la réception des Sacremens, de l’assistance aux Saints Mystères, de la sépulture Ecclésiastique ? […] Vous avez pour la profession de comédien le plus juste mépris : la société elle-même, d’accord sur ce point avec la religion, les exclut de toutes sortes de dignités & d’honneurs, & en cela elle fait de leur art la censure la plus sévère ; & vous ne rougissez point d’assister à leurs jeux profanes ? […] Oui ; si quelque chose est capable de nous avilir aux yeux des Sages, c’est l’importance que nous attachons à cet art frivole & dangereux ; c’est de voir que les comédies & les comédiens soient l’objet continuel de nos conversations comme de nos ouvrages périodiques, & qu’on soit en quelque sorte obligé de se bannir de la société, lorsqu’on n’est pas en état d’y rendre compte du bon ou du mauvais succès d’une pièce nouvelle, du jeu d’un acteur, de la figure ou de la voix d’une actrice. […] L’amour profane, cette passion si criminelle en elle-même & dans le larcin qu’elle fait à Dieu de notre cœur ; cette passion si incompatible avec la sagesse & la tranquillité de l’ame ; cette passion si funeste par les ravages qu’elle cause quelquefois dans la société & par les crimes qu’elle y occasionne ; l’amour, dis-je, n’est pas la seule maladie que les Spectacles puissent donner à nos ames. […] Elle ne tolère point leurs désordres sans doute ; elle les punit, au contraire, avec toute la sévérité de sa discipline ; elle avertit sans cesse les coupables du précipice affreux qu’ils se creusent & des trésors de colère qu’ils amassent sur leur tête : mais elle ne prononce pas toujours contre eux des jugemens publics & solemnels ; elle n’use pas toujours du droit qu’elle a de les retrancher de sa société.