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16. (1781) Réflexions sur les dangers des spectacles pp. 364-386

des gens qui traînant une existence affoiblie par un libertinage forcené, flétrie par toutes les espèces d’épidémies qui marchent à sa suite ; constituant au milieu de l’état une société particulière sans liens fixes, sans domicile et sans patrie, déchue des honneurs et des avantages de la société générale, vagabonde comme les Zigeiners et les Tartares, aussi indépendante de toute législation que les Algonquins et les Ubiquas ; des gens, dis-je, qui ne peuvent prêcher la vertu autrement que par le spectacle des tristes fruits de son rival… Vertu prêchée par des histrions ! […] C’étoit chez vous un crime odieux à la société, toujours sûr de la vengeance des dieux, d’initier le premier âge à la pratique du mal. […] A-t-on seulement soupçonné que, toute vue de religion, de morale, de décence étant mise à part, le bien de la société générale étoit étrangement compromis dans cette fatale substitution ? […] L’énergie des vertus éteinte depuis long-temps, ne promet plus rien d’utile ou d’honorable à la société. […] « Si je considérois le théâtre relativement à l’humanité, à ce sentiment précieux qui nous fait aimer et rechercher le bien-être de nos semblables ; je le peindrois comme un gouffre qui engloutit la substance des citoyens, la propriété des commerçans, les secours des pauvres et des malheureux ; qui met le trouble et la confusion dans tous les états de la société.

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