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67. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE I. Du sombre pathétique. » pp. 4-32

Abbé, ni le Maître des novices, ni les autres Religieux, ni les domestiques, ni ceux mêmes qui la déshabillent et la servent dans sa maladie, s'avisent de soupçonner son sexe, que sa jeunesse, sa délicatesse, son teint, sa beauté, ses grâces, et tout ce que la plume des Poètes et des Romanciers prodigue à peu de frais à leurs héroïnes, devaient au premier coup d'œil faire deviner aux moins attentifs. Autre merveille : elle soutient une année entière toute l'austérité de la Trappe, si supérieure à la faiblesse de son sexe et à la corruption de son cœur, sans avoir ni le dédommagement de la passion, puisqu'elle ne se fit jamais connaître à son amant, encore moins le secours de la religion et de la grâce, puisqu'elle fut toujours, dit-elle, « des désordres du cœur la honteuse victime », Quelle idée ! […] Cette femme mourante voit son amant parmi ces Religieux, l'appelle, lui parle, et déclare publiquement son sexe, son amour, ses folies, ses crimes, par un discours dont le brillant, la vivacité, les antithèses, la suite artiséea, le long détail, sont aussi contraires à la tristesse et à la faiblesse de l'esprit, que son énorme longueur est au-dessus de la faiblesse du corps d'une agonisante, et surtout répréhensible dans une personne qu'on dit se convertir dans ce moment terrible, et qui s'occupe avec la plus vive passion de ce que sa conversion l'oblige d'oublier, et qui ne peut que scandaliser ceux à qui elle en fait l'étalage. […] « Et ce vœu de mon cœur, ce vœu de la nature(l'union des deux sexes) N'a-t-il pas précédé mes serments odieux (les vœux monastiques) ?

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