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274. (1781) Lettre à M. *** sur les Spectacles des Boulevards. Par M. Rousseau pp. 1-83

Il les ridiculise, les méprise, & souvent même les hait au point de leur nuire, pour peu que dans le dommage qu’il est prêt à leur causer, il trouve seulement l’apparence de son intérêt personnel. […] Si la raison particuliere était toujours nécessairement & invariablement conforme à la raison universelle, à la nature des choses, aux loix de la société, si la droiture naturelle était inaltérable, & les passions incorruptibles, alors, & seulement alors, il faudrait se fier entierement à la nature, laisser mûrir la raison, & en attendre ces vertueuses habitudes qu’on a tant de peine à former… Mais, où trouver des enfans si heureusement nés, d’une organisation si pure, d’un esprit si parfait, que les habitudes les plus nobles & les plus généreuses croissent & se fortifient d’elles-mêmes en eux, sans le secours de l’instruction, & malgré la contagion du mauvais exemple ? […] Pourquoi souffrir qu’on parle aux hommes, je ne dis pas seulement un jargon plat, futil & trivial, (ce qui serait déjà un très-grand mal, puisque la corruption du Goût influe toujours sur celles des mœursFeuille Hebdomadaire de 1770, par M. de Querlon. […] Les mœurs ne sont pas seulement l’ornement d’un Etat, elles sont le gage le plus sûr du bonheur de la société, et le plus ferme appui de la puissance de ceux qui gouvernent. […] Car si nous ne permettons pas aux Enfans mêmes toutes sortes de jeux, mais seulement ceux qui peuvent s’accorder avec l’honnêteté, combien plus devons-nous prendre garde de ne nous rien permettre sur ce sujet, qui ne convienne au caractere du parfait honnête homme.

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