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91. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE I. Réformation de Riccoboni. » pp. 4-27

Il y en a bien d’autres qui ne sentent pas moins leur péché, & n’ont pas le courage de se convertir. […] On n’a pas besoin d’apprendre à sentir une passion que la nature n’inspire que trop ; mais on a extrêmement besoin d’apprendre à la réprimer. […] Ils ne sont pas en état d’en suivre l’intrigue, & de faire réflexion à la morale ; s’ils avouoient la vérité, nous verrions avec douleur qu’ils n’en ont retenu que le mauvais ; ils en rapportent les plus pernicieuses impressions, ils y apprennent toujours trop tôt à connoître & à sentir l’amour ; & quand même il seroit vrai qu’il faut que tôt ou tard ils le connoissent, ce que je suis très-éloigné de croire, il n’y auroit pas moins d’inconvénient & de cruauté de leur donner sur une matiere si délicate des leçons prématurées, infiniment funestes à leur innocence, avant qu’ils sentent quel est son prix, & combien sa perte est affreuse & irréparable. […] La religion & la vertu n’approuvèrent jamais qu’on fît sentir à l’ame de si violens mouvemens ; cela seul a dû faire interdire le théatre.

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