L’auteur effrayé sans doute de combattre le sentiment unanime des Chrétiens de tous les siécles, y mettoit bien des précautions & des assaisonnemens ; il en excluoit sans pitié les Religieux & les Ecclésiastiques, même des loges grillées ; il ne souffroit que des piéces épurées, des acteurs vertueux, des actrices modestes, des spectateurs raisonnables ; en sorte que la pureté n’y courroit aucun risque, tel que pouvoit être le théatre de quelques Communautés Religieuses, mais tel que ne fut & ne sera jamais le théâtre public. […] Tout en effet fut fini ; personne ne défendit un sentiment si dangéreux & si faux. […] Rousseau dans la Préface où il prétend excuser ses obscenes Epigrammes, dit avec raison : Les contes de la Fontaine tous licentieux qu’ils sont, sont incomparablement moins dangereux que les Eneïdes d’Ovide, & les Opéras de Quinaut, qui n’ont pourtant rien de licencieux, ni même d’équivoque ; mais, dit-on, ce ne sont pas ses propres sentiments qu’exprime l’actrice, ses propres foiblesses qu’elle détaille, ce sont ceux du personnage qu’elle joue ; qu’importe l’habit dont elle est couverte, le nom qu’on lui donne, est-ce moins l’objet du vice ?