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66. (1789) La liberté du théâtre pp. 1-45

De quels traits de feu n’eût-il pas sû peindre les usurpations & les fureurs du Sacerdoce ; l’établissement de l’Inquisition ; les forfaits d’un Alexandre VI ; les guerres longues & sanglantes que le Fanatisme-allumoit, tour-à-tour, dans tous les coins de l’Europe ; des millions d’hommes égorgés pour des querelles Théologiques ; &, malgré tant d’atrocités, les Peuples courbant toujours la tête sous un joug imbécille & cruel, que leur sang avoit tant de fois rougi ! […] Est-il possible de représenter, sur le Théâtre, un Roi de France tout-à-la-fois homicide & parjure, un Roi de France qui verse le sang de ses Sujets ? […] Non, sans doute, un ouvrage où le fanatisme est peint des couleurs les plus noires, c’est-à-dire de ses véritables couleurs, non sans doute, un ouvrage où la tolérance est prêchée sans cesse, ne sauroit nuire à la Religion, à moins que la Religion ne soit essentiellement fanatique, & prodigue du sang des hommes. […] Peut-être le Conseil de Louis XIV n’auroit pas été animé du même esprit que le Conseil de Charles IX ; peut-être l’industrie des François n’auroit pas enrichi l’Etranger de notre ruine ; & peut-être le sang des François n’auroit pas coulé sur les échafauds du Languedoc, pour des opinions théologiques.

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