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45. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE IV. Spectacles singuliers. » pp. 106-127

On le prend par la main, on l’habille d’une belle robe, on le méne au milieu de l’assemblée, & l’appellant par le nom du mort qu’on lui donne : Un tel, dit-il, est mort, le voilà ressuscité, je vous le présente ; il sera toujours ressemblable à lui-même, plein de sagesse & de courage ; il battra tous vos ennemis : vous devez le servir & lui obéir. […] Avec cette différence que ces peuples sont sauvages, qu’ils ne font mourir personne, & que ce peuple si célebre par ses Loix, ses vertus, sa sagesse, y faisoient périr des milliers d’hommes, & pire que les barbares s’amusoient de cette boucherie, à la mort, aux funérailles, au mariage, à la naissance des enfans, &c. […] Les Comédiens pensent comme lui : admirez les progrès du théatre ; ce fut d’abord une bonté dans les Rois de le tolérer, pour l’amusement du peuple ; ensuite un trait de sagesse de donner cette occupation aux gens oisifs, qui feroient encore pis, s’ils étoient laissez à eux-même. […] Nous n’avons garde d’attribuer au Roi, plein de bonté & de sagesse, des profusions si énormes ; c’est l’ouvrage des artistes, & de ceux qui ont présidé, qui, pour se signaler, n’y ont mis aucune borne.

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