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105. (1758) Lettre à M. Rousseau pp. 1-42

La première pensée, la réflexion constante d’un sage, que le mécontentement vient à désabuser de cette chimère de perfection, qui l’avait séduit dans son ami, c’est j’étais libre, et je ne le suis plus ; vos défauts, que je suis obligé de supporter, sont des chaînes qui s’appesantissent chaque jour. […] Si une malheureuse constitution ne l’avait pas rendu lui-même un objet malheureux, il était né pour partager son temps entre les sages et les fous ; il eût été l’admiration des uns, le flambeau des autres, et l’amour de tous. […] Ces Solitaires n’étaient heureux et sages qu’en apparence. […] Le monde lui devient odieux, le tombeau où il respire un venin si fatal, lui paraît un asile encore trop incertain contre la corruption qui inonde la terre, il ne peut être sage qu’à force de mépris pour les hommes : mais les femmes surtout lui paraissent odieuses et redoutables ; à ce seul nom il tremble ou s’enflamme.

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