/ 340
85. (1781) Réflexions sur les dangers des spectacles pp. 364-386

Au temps de ce conquérant sanguinaire qui ravagea le monde entier pour s’élever un trône sur les débris de la république romaine, le senat, si nous en croyons un écrivain célèbre, n’étoit qu’une assemblée d’athées. […] Dans ces armées de Goths, de Huns, de Vandales qui démolirent l’empire romain, y avoit-il des malades ? […] Rien ne rend l’homme dur et insensible comme les impressions de luxure ; mettant sa félicité dans cette jouissance brutale, il ne voit plus dans ses semblables que des machines propres à la faire naître. — Quand le peuple romain fut rassasié de spectacles mimiques, il lui fallut des gladiateurs ; il n’y avoit plus que le sang humain et l’aspect des cadavres mutilés qui pût lui donner un plaisir sûr. — Néron, Caligula, Héliogabale n’étoient des monstres de férocité que parce qu’ils étoient des monstres d’incontinence. […] Les chevaliers romains ne prirent la fuite que par la crainte d’être désigurés ; les Gaulois, par ordre de César, ne les frappant qu’au visage. […] Long-temps après cette brillante époque de la sagesse romaine, on ne voyoit encore d’autre espèce de baladins, que des chansonniers dont Thespis avoit donné le modéle en Grèce, qui, montés sur des chariots chantoient des vaudevilles, en se barbouillant la physionomie de choses très-peu appétissantes.

/ 340