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8. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — PREMIERE PARTIE. Quelle est l’essence de la Comédie. » pp. 11-33

Je demande à quelqu’un qui se trouve malheureusement sous la puissance d’un avare, si toutes les actions de cet avare l’excitent à rire, & si au contraire il ne maudit pas cent fois le jour, celui dont il éprouve la cruelle avarice. […] En excluant, me dit-on, de la Comédie le ridicule qui tombe sur l’extérieur du vice, ou sa maniere d’être, vous ôtez à la Comédie son plus grand agrément, qui est celui de corriger les mœurs en faisant rire, & de faire passer dans l’ame des Spectateurs d’utiles vérités par le canal du plaisir. Il est de l’essence de la Comédie de faire rire. […] S’il n’est pas de l’essence d’une action vertueuse ou vicieuse d’exciter à rire ceux devant qui elle se passe, il n’est pas par conséquent de l’essence de la Comédie de faire rire les Spectateurs, puisque la Comédie ne traite que des actions vertueuses ou vicieuses. Je dis plus, une Comédie qui a beaucoup fait rire les Spectateurs a manqué son effet ; car c’est une preuve que l’Auteur aura pris du vice tout ce qu’il renfermoit de ridicule, & qu’il s’en sera tellement occupé, que les Spectateurs n’auront rien trouvé d’odieux ou de révoltant dans ce vice dont on vouloit cependant les corriger.

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