Mais on ne fait guère de Comédie qui n’ait pour but la représentation, autrement ce serait l’idée de la Comédie qui ne se trouve point : ainsi la pratique en est déjà selon vous très vicieuse. […] Or, Monsieur, puisqu’il est presque impossible de traiter cette matière sans appeler le christianisme au secours, Dieu qui connaît si bien la faiblesse des hommes, ne leur a pas dit pour rien, soyez sur vos gardes, veillez et priez, pour ne point entrer en tentation, imaginez-vous que l’ennemi est toujours aux portes ; ce qui est, ce me semble, une manière d’avis au Lecteur ou au Spectateur, comme vous voudrez, des Tragédies, dans lesquelles on se livre de gaieté de cœur à la représentation des passions. […] Vous qui savez si bien réunir dans une même personne deux caractères si opposés, comment n’avez-vous pas senti que Joseph rapporte cet amour vivement, mais simplement, pour ne pas déroger à son caractère d’Historien ; au lieu que si Joseph avec tout l’artifice que fournit cet art, où vous vous êtes rendu si célèbre ; s’il venait, dis-je, avec toutes les richesses de la Poésie peindre les transports d’un mari passionné pour sa femme, quoique cette maladie ne règne guère en France, je ne doute pas qu’il n’y eût des maris assez sensibles pour s’attendrir à cette chaste représentation : la question est de savoir si le fruit en reviendrait à leurs épouses légitimes.