Transportons-nous à la représentation. […] Mais, comme ces connaissances, que des Rois doivent acquérir à la représentation de Britannicus, semblent plus appartenir à la méditation qu’au sentiment, considérons dans les mêmes spectateurs l’effet immédiat du spectacle…. […] Cependant, puisque je parlais de Cinna, j’observerai que cette tragédie peut être utile aux Sujets comme aux Rois ; car il me semble qu’il n’est point de spectateur qui, frappé de la générosité d’Auguste, ne se retire avec une disposition plus prochaine à pardonner et à faire du bien même à son ennemi, que ne serait en lui celle de se venger cruellement, après avoir assisté à la représentation d’Atrée : d’où je conclurai hardiment que si la tragédie d’Atrée a manqué le but que doivent se proposer les Poètes dramatiques, celle de Cinna y est manifestement parvenue. […] Si Alexandre, en lisant l’Iliade, conçut le dessein de surpasser les exploits d’Achille, qui sait combien la clémence d’Auguste, depuis sa première représentation, a conservé de têtes dans l’Europe ? […] N’avez-vous jamais été frappé de la représentation du préjugé à la mode ?