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41. (1846) Histoire pittoresque des passions « RELIGION » pp. 158-163

Ceux qui avaient introduit l’usage des spectacles en France, jaloux de se voir disputer et enlever un si précieux privilège, suscitèrent des anathèmes contre leurs concurrents, et travaillèrent les esprits pour rendre le théâtre méprisable aux yeux du monde. […] Mais la religion est comme les passions qui doivent être utiles aux hommes : lorsqu’elle n’est pas exercée avec sagesse, avec une prudente modération, elle peut nous éloigner de la voie de nos devoirs, influer sur notre humeur et nous faire devenir aussi pervers qu’elle aurait pu nous rendre bons et bienfaisants. […] Mais jetons un coup d’œil rapide sur les ministres d’une religion austère, sur ceux mêmes qui en suivent extérieurement les préceptes, sur tous ceux qui la font servir à leurs lâches projets, soit pour satisfaire leur envie, soit pour protéger leur ambition, et nous trouverons comme compagnes inséparables de leurs caractères : l’insatiabilité, qui les rend avides de richesses, d’honneurs et de vénération servile ; l’égoïsme, qui les porte à tout faire pour eux-mêmes et à ne rien rapporter aux autres ; insensibilité, qui, après avoir endurci leurs cœurs à la vue des maux qui accablent l’humanité, à l’aspect des souffrances qui précèdent la mort, et que, dans leurs exercices, ils sont appelés à contempler, rend leur âme inaccessible aux douces impressions de la vertu et aux charmes de la sociabilité ; la cupidité, qui les rend sévères pour ceux dont la misère réclame des soins qu’elle ne peut assez récompenser, adulateurs et serviles auprès de ceux à qui les richesses et le faste permettent de faire de nombreux sacrifices.

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