En effet, est-il rien de plus utile pour la jeunesse, que de lui proposer des exemples frappans à suivre ou à éviter ; de lui peindre les ravages du vice dans l’ordre moral ou politique, & de lui représenter les heureux effets de la vertu ? […] L’utilité de la Comédie étant reconnue, ce seroit ici la place d’examiner quelle est la forme qui lui convient le mieux pour parvenir au but qu’elle se propose de corriger les mœurs ; si la Comédie grecque étoit plus proche de la perfection morale que la nôtre, en nommant les personnes vicieuses qu’elle exposoit à la satire publique ; enfin si l’exclusion des Actrices sur les Théâtres Grecs & Romains, n’étoit pas plus propre à laisser dans l’ame des Spectateurs des impressions de vertu dégagées de tout mêlange de volupté qu’on remporte presque nécessairement de nos Spectacles. Mais sans entrer dans toutes ces discussions sur la Comédie ancienne & moderne, discussions qui n’aboutiroient vraisemblablement qu’à faire pencher la balance du côté de l’une ou de l’autre sans faire adopter la meilleure, je me bornerai ; 1°. à examiner la Comédie dans sa nature, c’est-à-dire dans le but qu’elle doit se proposer ; 2°. ensuite j’examinerai si les Comédies Françoises ont atteint le vrai but que se propose la Comédie ; 3°. enfin je rechercherai s’il n’y a pas quelques obstacles qui s’opposent parmi nous à la perfection de la Comédie.