Les honnêtes gens, les vrais dévots, les bons prêtres, n’auraient pas été plus affectés ni plus compromis dans ce cas que nous ne le sommes tous chaque fois que la justice appréhende et punit personnellement un scélérat attaché à notre profession qui prenait, comme Tartufe, tous les dehors d’un honnête homme. […] L’injustice de déshonorer et avilir une profession par des critiques ou satires vagues est d’autant plus grande que le vice ou la corruption n’est pas attachée particulièrement à tel ou tel état, qu’elle appartient aux personnes, ou aux mœurs, au siècle, en un mot, et que tous les états recèlent dans la même proportion, à peu-près, des hypocrites et des fripons. […] Je reconnais vos droits à mes hommages, et je vous les offre avec autant de plaisir que vous me trouvez de dureté à rendre mon mépris pour ceux qui déshonorent si cruellement vos professions. Je renouvelle aujourd’hui ce vœu que j’ai déjà formé, pour que les hommages qui vous sont dûs vous accompagnent jusqu’au-delà du tombeau ; qu’il soit fait une distinction nationale entre la mémoire d’un homme vil qui a passé sa vie à déshonorer sa profession, autant qu’il fut en lui, à tromper, à affliger ses concitoyens, dont il a mérité le mépris et la malédiction, et la mémoire de l’homme probe et bienfaisant qui emporte avec lui la bénédiction, les regrets et les larmes de ceux qui l’ont connu ; et que le nom chéri de ce bon citoyen soit proclamé et célébré ; que ses restes vénérables soient conduits au dernier asile par un père de la patrie, entourés des honnêtes gens dont il s’est fait aimer, des infortunés qu’il a secourus et qui pleurent sa perte ! […] Pour dissiper parfaitement et sans retour les anciens préjugés existants contre cette profession diffuse et disloquée, et en ennoblir les fonctions, donner toute considération à ceux qui les exerçent, et les mettre dans la seule situation propre à en remplir dignement le plus important objet, en un mot, pour arrêter dans sa principale source le mal que les spectacles font, je ne crois pas qu’il y ait de moyen plus naturel et plus sûr que d’affilier ou aggréger l’école théâtrale au grand corps d’instruction et d’éducation nationales, à l’université, qui doit en effet toujours être le centre, former l’unité de toutes les écoles publiques de morale.