Qu’on analyse d’après ce principe, la plupart de nos Comédies, & l’on en tirera cette maxime générale, que l’exemption du ridicule est tout ce que la société exige de nous ; & moi je pense au-contraire qu’on peut sans danger laisser subsister les ridicules, mais qu’on ne peut pas de même laisser subsister les vices. […] Pour la résoudre, il est à propos de se rappeller le principe que j’ai établi ci-dessus, savoir que la Comédie est le portrait naturel des mœurs. […] Ceci pourra paroître singulier à la plupart de ceux qui sont accoutumés à regarder la Comédie comme un Spectacle de pur amusement ; mais je les prie de mettre à part les préjugés que l’habitude leur a fait contracter, & d’examiner quelques Comédies d’après les principes constitutifs de son essence, j’espere après cela, que la plupart de mes lecteurs trouveront mon opinion moins extraordinaire. […] Reprenons en peu de mots les principes que nous avons exposés ci-dessus. […] On me demande maintenant quelle figure je crois que fera la Comédie, si on la travaille d’après mes principes ; je réponds qu’elle tiendra dans l’esprit des gens raisonnables le rang qu’elle mérite ; je n’empêche pas qu’on ne donne des Comédies bouffonnes pour ceux qui aiment que la Comédie les fasse rire, mais je prétends que ces Comédies sont contraires au but que doit se proposer la bonne Comédie ; au lieu que celle-ci a au-moins la gloire de travailler à la correction des Mœurs.