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86. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien cinquieme. Le danger de la Comedie en particulier, decouvert par le R. P. F. Guilloré de la Compagnie de Jesus. » pp. 67-79

Je ne diray pas, que c’est pecher mortellement, d’aller à la comedie : mais je diray qu’à plusieurs c’est peché mortel, d’y aller : La verité de cette proposition ne se prend pas simplement du spectacle, mais encore des dispositions particulieres de la personne. Elle est, par exemple, d’un temperament doux & tres-sensible ; elle a un cœur, qui prend aussi-tôt feu ; l’imagination en est vive & forte, pour conserver la molesse, & l’impureté des images ; la volonté en est naturellement foible, & facile, pour se laisser aller à toutes ces representations ; elle a l’experience de ces desordres secrets, qu’elle a plûtôt aimez, qu’elle n’a combattus. […] Et n’est-ce pas comme acheter à pris d’argent, ce qui est souvent le sujet, & la matiere de sa perte ? […] Me direz-vous encore, qu’on en voit, qui étant consacrez à Dieu, ne font aucune difficulté de se trouver avec les seculiers, pour prendre le divertissement de la Comedie ? […] C’est l’apas, où sont pris ceux, qui au reste veulent le bien, mais qui veulent aussi avoir part aux plus agreables divertissemens du siecle ; Et c’est ainsi, que cette mal-heureuse reformation, engage plusieurs personnes de pieté dans un desordre, où l’on ne voyoit auparavant que celles, qui avoient renoncé à la vertu.

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