Vous ne vous attendez peut-être pas, Monsieur, en lisant du premier abord cette proposition, que je vous la veuille prouver par l’autorité des Saints Pères : cependant à la bien examiner, c’est leur propre sentiment, et celui même de Tertullien et de saint Cyprien, qui sont les deux qui semblent s’être le plus déchainé contre la Comédie. […] Ce n’est pas pour cela que les derniers le cèdent en science et en sainteté aux premiers, c’est que la Comédie se change Introd. ad vit. devot. […] Vous m’avez dit vingt fois vous-même, que les Comédiens étaient fort circonspects sur cette matière, et qu’ils ne voulaient pas souffrir, quand ils acceptaient une Pièce qu’il y eut rien d’indécent ou de libre, pas même une équivoque, ni la moindre parole sous laquelle on put cacher du poison ; comme de fait on n’en trouve point dans les Comédies qu’on imprime, ce qui prouve de soi que cette première condition se garde exactement dans nos Comédies, où l’on ne se sert point de ces paroles déshonnêtes ou impies, que l’Apôtre saint Paul, et après lui saint Chrysostome, nous ordonne de fuir, lorsqu’il nous exhorte, « de dire ni écouter avec plaisir ces sortes de paroles folles et impudentes, qui bien loin de nous devoir exciter à rire, ont de quoi nous obliger à pleurer ». […] Nous avouons, disent nos Réformateurs, qu’ils n’osent ouvertement rien dire d’impie, ni faire sur la Scène les infamies qui s’y commettaient autrefois ; mais il reste toujours quelque chose de cette première corruption déguisée sous de plus beaux noms.