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86. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — QUATRIEME PARTIE. — Tragédies à corriger. » pp. 180-233

Les Poètes qui ont retranché Créon de cette Tragedie n’ont pas senti de quelle importance était ce personnage, sans lequel ils ne peuvent suivre la maxime généralement embrassée et établie par les premiers Maîtres de l’art : ils prétendent, ces Maîtres (mais en ce point je ne sais si leur avis est bien sûr) ils prétendent, dis-je ; que lorsque le Héros de la Pièce doit succomber à une infortune qu’il n’a pas méritée, il faut adroitement mettre des bornes à la compassion des Spectateurs, en la diminuant par quelque trait qui donnent atteinte ou à la vertu, ou au caractère de ce personnage. […] N’est-il pas clair, après ces réflexions, que les Poètes Grecs ne prétendirent jamais affaiblir la compassion dont les Spectateurs étaient émus pour Œdipe, pour Oreste, pour Hyppolite, etc ? […] D’un autre côté, si les Tragédies (comme quelques Modernes le prétendent) devaient toujours être nommées du nom de l’Acteur qui y meurt, nous serions bien embarrassés comment nommer la Tragédie qui s’appelle Médée ; serait-ce Créuse, Créon, les Enfants, Jason même ?

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