Au milieu des bouffonneries dont ses Piéces sont remplies, nous voyons que le Chœur s’adressoit souvent aux Spectateurs pour leur faire observer que ce Poëte ne les amusoit pas comme les autres, par un frivole badinage, & leur débitoit d’importantes vérités, auxquelles ils devoient faire attention. […] Jamais Poëte ne fut si extravaguant en apparence, & ne traita des Sujets si sérieux : mais jamais Poëte ne put traiter de pareils Sujets, que dans une Ville où toute critique étoit bien recue sur le Théâtre, pourvu qu’elle fût tournée de façon, qu’elle fît rire : les Atheniens s’imaginoient que quand Bacchus étoit fustigé sur leur Théâtre, ce Dieu en rioit lui-même. […] Un bon Poëte Comique fait comme les Peintres, qui dans ces Portraits qu’ils nomment Charge, savent peindre un homme en ridicule, en lui conservant sa ressemblance. […] Un Poëte peut être très-fin railleur, & ne pas savoir donner ce tour plaisant à une Comédie. […] Ces Personnages si ennuyeux, deviennent plaisans sur le Théâtre, par la maniere dont le Poëte sait les y faire paroître : l’Imitateur sait même nous faire appercevoir d’un Ridicule qui ne nous avoit pas frappés, avant son Imitation.