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15. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE IV. Spectacles singuliers. » pp. 106-127

Ce n’étoit pas une sale, c’étoit une vaste pleine, où, par des machines & des ouvriers sans nombre, on étaloit les décorations les plus étranges ; C’étoit une Ville affiégée, une armée qui la bat & la prend. […] Nous n’avons garde d’attribuer au Roi, plein de bonté & de sagesse, des profusions si énormes ; c’est l’ouvrage des artistes, & de ceux qui ont présidé, qui, pour se signaler, n’y ont mis aucune borne. […] D’un côté les nudités, l’indécence, le libertinage, les crimes, & de l’autre le fils d’une Vierge, plein de modestie, de douceur, d’humilité, en un mot le christianisme est-le théâtre. […] Cette Fête dure dix jours, les rues sont pleines d’hommes à demi nuds, accablés de tristesse qui chantent les louanges d’Hussein. […] Un charriot plein de sable d’où sortent des têtes dégoûtantes de sang ; & un autre plein de bras, de jambes, avec des cierges allumés, & plusieurs autres charriots remplis de corps morts, de tourterelles, de pigeons qu’on laisse voler, & divers chevaux chargés du bagage & des armes des morts, d’étendarts, des turbans, & du sabre d’Ali long de trente pieds, avec lequel il fendit la Lune.

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