Tous les Spectacles inventés par les hommes, offrent aux yeux du corps & de l’esprit, des choses réelles ou feintes : voici comme on envisage ce genre de plaisir. […] Un homme égorgé dans l’arène, accoutume le spectateur à voir le sang avec plaisir. […] Mais une chose certaine, c’est que dans toute espèce de Spectacle, on veut être ému, touché, agité, ou par le plaisir de l’épanouissement du cœur, ou par son déchirement, espèce de plaisir : quand les Acteurs nous laissent immobiles, on a regret à la tranquilité qu’on emporte, & on est indigné de ce qu’ils n’ont pas su troubler notre repos. […] Tu verras, dans la suite, chère Ursule, par qui le plaisir de la Représentation doit nous être procuré : si des maximes saines sont efficaces dans une bouche impure : quel serait le moyen de parer à cet inconvénient, & de rendre en tout sens notre Théâtre une école de vertu. […] Ils ont tous envisagé le Théâtre comme dangereux, non-seulement par ses Pièces, par la Musique, par les Danses, par le temps que les Spectacles consument, mais encore par le plaisir qu’ils procurent au Spectateur : c’est ainsi que par un excès de sévérité, ils n’ont fait que révolter l’homme raisonnable, qui sait bien qu’il peut se réjouir sans crime, que le plaisir est un don du Créateur, & qu’en prendre avec la modération convenable pour ne pas le détruire, c’est user du plus incontestable de ses droits.