Le plaisir & la douleur en se fesant sentir à l’âme, ont donné au corps des mouvemens qui peignaient au dehors ces différentes impressions : c’est ce qu’on a nommé geste. […] Tout ce que la Poésie, la Musique, la Danse, les Machines peuvent fournir de plus brillant, fut épuisé dans ce Spectacle superbe : la description qui en parut, étonna l’Europe, & piqua l’émulation de quelques hommes à talens, qui profitèrent de ces nouvelles lumières, pour donner de nouveaux plaisirs à leur Nation. […] Bien des gens ont de la peine à comprendre, quel plaisir peut donner un Spectacle qui agite l’âme, qui l’importune avec inquiétude, qui l’effraie, & qui n’offre que des craintes & des alarmes. […] D’où peu donc venir ce plaisir extrême, qui accompagne seulement le danger où se trouvent nos semblables ? […] Je ne le pense pas, quoique l’inhumanité n’ait malheureusement que des branches trop étendues : mais je crois, avec l’Auteur des Réflexions sur la Poésie & la Peinture, que le plaisir dont il s’agit ici, est l’effet de l’attrait de l’émotion qui nous fait courir par instinct après les objets capables d’exciter nos passions, quoique ces objets fassent sur nous des impressions fâcheuses.