La brodeuse, le tailleur, les femmes de chambre empressées à servir la Déesse ; les Dames du monde qui viennent admirer, étudier, copier ce sublime modelle ; une multitude d’amans ou soi-disans qui la contemplent, dont les fadeurs ne peuvent épuiser le détail de ses charmes, lui répettent les vers flatteurs composés à sa gloire, lui appliquent ceux qu’on a adressés à d’autres, qu’on a débité dans les pieces, & lui en débitent de nouveaux ; elle-même en extase devant son miroir, enivrée de sa beauté, qui s’adore elle-même & se préfere à ses rivales, & compte les victoires qu’elle va remporter, les conquêtes qu’elle va faire ; quelquefois aussi transportée de colère, si un ruban n’a pas son pli, si un cheveu n’est pas à sa place, si la coiffeuse a oublié une épingle, &c. donnant ses ordres, lisant ses lettres, parcourant quelque brochure, parlant à ses adorateurs, recevant leur encens, les récompensant d’un souris, d’un coup d’œil, &c. […] La voila cette Actrice portant la scene dans l’Eglise, qui y joue le même rôle que sur le théatre, assise sur l’Autel de son fauteuil, elle prend la place de Dieu, elle étale ses ornemens & ses graces, se présente à l’adoration de tout le monde, attire tous les regards, s’attache tous les cœurs, reçoit tous les hommages ; on ne pense qu’à elle, on n’admire, on ne loue, on n’encense qu’elle, hélas !