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93. (1700) IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, etc. [Sermons sur tous les sujets de la morale chrétienne. Cinquiéme partie] « IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, &c. » pp. 95-126

Je vous diray donc, encore une fois, que quoyque ces spectacles, dont on est si passionné, ne soient plus cruels, ni si infâmes qu’ils l’étoient en ces premiers temps, ils ne sont pourtant guere moins dangereux, & qu’eû égard à la disposition de plusieurs, c’est à dire de ceux qui connoissent leur foiblesse, & qui n’en ont déja que trop d’experience sur ce point, c’est sans contredit un peché mortel ; quoyqu’il ne leur soit pas évident qu’ils donneront consentement à toutes les pensées, & à tous les desirs criminels que ces objets pourront faire naître. […] Prenez bien, je vous prie, ma pensée ; car je ne parle point des dangers imprévûs, involontaires, & où le hazard nous a jettez ; je parle de ceux que l’on recherche, où l’on s’expose, & que l’on connoît. […] ou bien, n’est-ce pas mettre en question, si les pensées volontaires, & les desirs que ces objets sont naître, & que l’on entretient ensuite ; sont défendus par la Loy Chrétienne, qui pour nous obliger à la pureté, se sert des termes les plus forts, & qui tiennent davantage de l’exaggeration, sçavoir, de nous arracher les yeux, s’ils nous sont une occasion de scandale, & où l’Autheur de cette Loy met au rang des crimes les plus énormes, les regards que l’on jette sur une femme à mauvais dessein : Matth. […] Or, s’il y a du danger de s’accoûtumer à entendre des sentimens & des maximes contraires à la Religion que nous professons, si l’Eglise même employe son authorité, pour défendre la lecture des livres suspects, si la compagnie des personnes qui ont toûjours ces maximes dans la bouche, ou qui reglent leur vie selon ces sentimens, est dangereuse, parce qu’ils les inspirent à ceux qui les frequentent ; y aura-t-il moins de danger à les voir exprimer, representer, approuver, écouter les applaudissemens que l’on donne à ceux qui les font le mieux sentir, & qui les font entrer dans l’esprit par la beauté des vers, & des pensées si noblement exprimées ?

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