Ceux qui dans ces derniers temps ont écrit contre la Comédie ont rapporté des Vers de Tragédies les plus dangereux et les plus capables d’exciter dans le cœur de l’homme toute sorte de passions. […] Ainsi tout ce qui contribuera à troubler cette paix, contribuera en même temps à dissiper cette heureuse harmonie ; et comme cette paix ne vient que de l’affaiblissement des passions vaincues et soumises, cette paix sera troublée par tout ce qui pourra réveiller, exciter, fomenter, et fortifier ces passions. […] et ces passions peuvent-elles être tranquilles lorsque tout contribue à les émouvoir ? […] Parce que la Comédie n’excite pas toujours les passions, vous avez cru, ou du moins dit, que sa fin et son dessein n’était pas de les exciter, et que si elle les excitait quelquefois, ce n’était que par hasard : et moi je prends le contre-pied, et je dis que si la Comédie dans l’usage ordinaire d’à présent n’excite pas toujours les passions, ce n’est que par hasard, parce que sa véritable fin et tout son but est de les exciter. […] En effet comment un Auteur peut-il donner la gêne à son esprit pour exprimer vivement une passion sans la ressentir lui-même ?