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142. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre premier.  » pp. 2-36

On annonce une piéce à lire, l’auteur arrive, on se leve, on le complimente, on se moque de lui, on le balote, on se l’envoie l’un à l’autre, la caustique Dumesnil veut le faire asseoir dans le fameux fauteuil, où tant d’hommes illustres ont passé avant que de se faire un nom immortel. […] Tout se passe dans les enfers, Pluton, Caron, Minos, Rhadamante, les ombres, &c. […] Momus & Thalie ont eu beau chercher, par ordre du pere des Dieux, quoiqu’ils aient fait passer en revue tous les caractères que feu Moliere a traités, ils n’en ont pas trouvé de nouveau à présenter à la plume. […] La mode en est passée, il en reste quelque vestige dans ce qu’on appelle divertissement, qu’on entremêle en entr’acte dans les piéces ; mais il a été défendu par les capitulaires de Charlemagne, sous de très grandes peines, & par les Ordonnances des Rois, d’employer aucun habit ecclésiastique ni réligieux ; ce seroit prophaner les choses saintes, & le jouer de la Réligion. […] Mais il passe sa vie au spectacle ; il écoute attentivement, il retient aisément ; peut-il ne pas goûter les oracles que prononce sur la scéne une belle bouche, qu’embellit un pas de trois, que réchauffe un coup d’archet, & qu’il est d’ailleurs si porté à croire ?

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