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50. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — TROISIEME PARTIE. — Tragédies à conserver. » pp. 128-178

Nous ne pourrions pas de nos jours proposer de pareils modèles ; ou, du moins, nous ne devrions jamais le faire, parce qu’ils blesseraient nos mœurs : aussi la Tragédie de Phèdre est elle du nombre de celles que je rejette : mais, dans Andromaque, il ne s’agit que d’un amour tout naturel, et qui, eu égard aux personnes et aux circonstances, n’a rien en soi de criminel ; cependant cette passion, toute simple qu’elle est, se trouve portée à un tel point de violence, dans Pyrrhus et dans Hermione, qu’elle produit tous les excès que nous voyons. […] Je conviens que le Poète pouvait se dispenser de mettre dans la bouche de Pauline le mot d’amour, qui force Polyeucte à lui faire la réponse que nous venons de voir ; mais on ne doit pas oublier qu’elle est Payenne ; elle a recours, pour persuader son mari, aux plus fortes armes dont elle pouvait faire usage : si Pauline avait été Chrétienne, Corneille ne lui aurait pas fait tenir un pareil langage ; ou, s’il l’eût fait, on aurait pu, avec justice, le lui reprocher. […] Les deux plus grands Tragiques de la France en ont usé bien différemment avec le Public, dans un cas à peu près pareil. […] On ajoutera qu’il s’agit précisément d’un fait pareil dans la Tragédie de Rhadamiste ; puisque c’est le père qui aime Zénobie et qui la veut épouser, pendant que les deux fils en sont éperduement amoureux l’un et l’autre.

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