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25. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre IX. Sentiments de S. Cyprien et de quelques autres Pères. » pp. 175-201

Un Chrétien doit garder soigneusement ses yeux et ses oreilles ; nous nous accoutumons bientôt au crime que nous entendons : « Oculi et aures custodiendæ ; scito assuescimus in scelera quæ audimus. » L’homme, trop porté au vice, est si facile à tomber ; que deviendra-t-il, s’il y est poussé par l’exemple ? […] Nous n’osons pas même aller aux autres spectacles, pour ne pas souiller nos yeux et remplir nos oreilles des vers profanes qu’on y lit, « ne oculi nostri inquinentur, et aures hauriant prophana quæ ibi decantantur carmina », par exemple, quand on y raconte ou représente les actions tragiques de Thyeste ou de Thésée. […] Nihil refert utrum luxuriam solus domi an cum populo exerceat in theatro. » La volupté des oreilles par la douceur du chant n’est guère moins dangereuse que celle des yeux. […] vos yeux, vos oreilles, tous vos sens, qui ont servi à votre sanctification, serviraient-ils à la volupté par un usage profane ? […] Je n’en parle qu’avec peine, je voudrais ne pas même les connaître : « Piget malum illud, vel nosse. » On ne peut en rappeler le souvenir sans risque ; les autres péchés ne s’attachent qu’à une partie de l’homme : l’esprit est souillé par les pensées, les yeux par les regards, les oreilles par les mauvais discours ; tout se rend coupable à même temps au spectacle : « In theatre nisi reatu vacat. » L’œil, l’oreille, l’esprit, le cœur, tout est attaqué, saisi, corrompu à la fois ; gestes, attitude, parure, danse, chant, discours, sentiments, tout se réunit pour perdre les cœurs : la pudeur souffrirait d’en tracer le tableau : « Quis integro verecundiæ statu eloqui valeat ? 

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